La force du bio dans les cuisines de collectivité: l'exemple de la Dordogne

L'alimentation joue un rôle crucial pour notre santé, l'environnement et l'économie locale. Le secteur de la restauration et les cuisines de collectivité ont un impact considérable à cet égard. Mais comment rendre l'alimentation plus durable dans les cuisines de collectivité? BioForum vzw, qui soutient le secteur biologique flamand, aide les organisations à intégrer et à promouvoir les produits biologiques. Marijke Van Ranst, coordinatrice des points de vente bio et des services alimentaires biologiques, nous fait part de ses réflexions après une visite inspirante en Dordogne, où les cuisines scolaires travaillent avec des ingrédients 100% biologiques et produits localement à 70%. Quelle leçon les cuisines de collectivité peuvent-elles en tirer?

SchoolFood4Change

La visite en Dordogne faisait partie du projet SchoolFood4Change. En quoi consiste exactement ce projet?

"SchoolFood4Change est un projet d'échange européen dans le cadre duquel les pays réfléchissent ensemble aux moyens de rendre les repas servis dans les cuisines scolaires plus durables. C'est dans cette optique que je me suis rendue en Dordogne, département représentant la France dans ce projet, fin novembre 2024 avec une délégation d'une trentaine de personnes issues de 10 pays européens (Estonie, Allemagne, Slovaquie, Belgique, Italie, Suède, République tchèque, Espagne, Autriche et France, n.d.l.r.). Nous nous sommes inspirés du modèle des cantines scolaires qui servent des repas 100% biologiques, produits localement, cuisinés en interne et de saison. Notre contact local a eu l'impression qu'on ne le croyait pas cru lorsque qu'il racontait son histoire dans notre concertation en ligne. Il fallait donc vraiment que nous allions sur place pour y croire. Il n'avait pas menti: ce qu'ils font en Dordogne est extrêmement enrichissant."

Qu'avez-vous vu et appris là-bas?

"Nous avons visité deux écoles: Le collège Jean Ladignac à Saint-Cyprien et le collège Jean Moulin à Coulounieix-Chamiers. Là, les cuisines préparent tout elles-mêmes avec des ingrédients 100% biologiques et produits localement à 70%. Ce modèle soutient délibérément l'économie locale et les agriculteurs biologiques. Ce qui rend cette approche unique, c'est la forte implication des étudiants et des fournisseurs. Il était inspirant de voir comment tout se met en place à différents niveaux. Outre les écoles, nous avons visité un producteur de légumes à Castels et la laiterie Péchalou à Saint-Cyprien. Le deuxième jour a été consacré à la chaîne d'approvisionnement, entre les mains de la plateforme Manger Bio Périgord à Sanilhac. Ces deux journées ont été une occasion unique de comparer des exemples pratiques avec nos propres situations. Il est clair que cette approche fonctionne vraiment là-bas."

Et ce malgré le prix plus élevé... car le bio n'est-il pas plus cher, comme on le pense souvent?

"C'est en effet ce que l'on pense souvent, mais en Dordogne, nous avons vu de nos propres yeux que ce n'est pas toujours le cas. En achetant intelligemment, par exemple en achetant des bêtes entières et en les transformant complètement, ils économisent beaucoup sur les coûts, par exemple. Bien sûr, cela demande de l'expertise, mais c'est faisable. Les cuisines préparent tout elles-mêmes et évitent ainsi les produits tout prêts, ce qui réduit aussi les coûts. L'accent est également mis sur les produits de saison, ce qui profite à la fois au prix et à la durabilité. Tout est une question d'organisation et de choix conscient de la qualité et de la proximité: le bio n'est pas forcément plus cher."

Quelles mesures concrètes les écoles belges peuvent-elles prendre?

"Les écoles qui disposent de leur propre cuisine ont tout intérêt à coopérer avec les agriculteurs locaux et à se lancer petit à petit. Commencez par des légumes biologiques, par exemple, et élargissez ensuite. Chaque petit changement fait déjà la différence. Une politique d'achat bien pensée et une vision commune au sein de l'équipe sont essentielles. Il faut que tout le monde regarde dans la même direction. Pour les écoles qui font appel à un traiteur externe, ce qui est encore le plus fréquent en Flandre, le dialogue est essentiel. Les traiteurs cuisinent généralement pour plusieurs écoles en même temps, de sorte que même un petit pas vers plus de bio peut avoir un impact important. Gand est un exemple inspirant: avec une vision forte et le courage nécessaire, ils ont déjà atteint 23% de produits biologiques dans leur restauration scolaire. Les parents jouent également un rôle à ne pas sous-estimer: ils demandent de plus en plus souvent une alimentation saine et durable pour leurs enfants, ce qui donne un coup de pouce au changement."

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Quelle est l'importance de l'implication des élèves dans cette histoire?

"Très importante! En Dordogne, les élèves participent activement aux comités de menus à l'école et vont même parfois chez les agriculteurs ou les producteurs. Ils comprennent ainsi mieux d'où viennent les aliments qui leur sont servis, ce qui renforce leur enthousiasme et leur motivation. Les enfants et les jeunes deviennent ainsi des ambassadeurs qui diffusent l'histoire, non seulement auprès de leurs parents, mais aussi de la communauté au sens large. C'est un effet boule de neige: grâce à l'implication des élèves, tout le monde prend conscience de l'importance d'une alimentation durable et saine. Nous ne pouvons que nous en féliciter".

ZoBio

ZoBio est un autre projet du BioForum visant à promouvoir l'agriculture biologique dans les services de restauration. Pouvez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet?

"Le projet ZoBio est un excellent exemple de la manière dont la coopération locale peut avoir un impact durable. Cinq établissements de soins flamands collaborent avec des agriculteurs biologiques pour intégrer davantage de produits biologiques locaux dans leurs cuisines. Ce projet est réalisé en collaboration avec Flanders' FOOD et ILVO (Institut de Recherche sur l'Agriculture et la Pêche), avec le soutien du Fonds européen d'investissement (EIP) et des fonds de l'Agence pour l'agriculture et la pêche en mer. L'objectif du projet ZoBio est de favoriser les relations à long terme entre les établissements de soins de santé et les agriculteurs biologiques. Une fois que les cuisiniers sont impliqués, cela ouvre un monde de possibilités. Cela stimule leur créativité, leur fierté professionnelle et les motive à traiter également les flux résiduels, comme le vert d'un poireau. Le résultat? Des repas sains et savoureux que les patients et le personnel peuvent apprécier. Tout le monde y gagne."

Enfin, que recommanderiez-vous aux cuisines de collectivité flamandes sur la base de ce que vous avez vu et appris en Dordogne?

"Engagez-vous dans un dialogue avec toutes les parties prenantes et travaillez à une vision qui va au-delà des budgets. L'alimentation est un besoin fondamental qui mérite d'être mieux valorisé. En adoptant une alimentation locale et biologique, non seulement nous améliorons la santé, mais en plus nous renforçons l'environnement et l'économie locale. Les petits pas font vraiment une grande différence".

3 leçons importantes apprises en Dordogne
1. Faites des choix politiques délibérés: en tant que gouvernement, le choix du bio et du local peut être soutenu en concevant les appels d'offres différemment. Par exemple, en divisant les contrats, les petits producteurs locaux peuvent également participer.
2. Allez-y progressivement: commencez petit et passez à l'échelle supérieure. Découvrez ce qui est disponible localement et intégrez-le progressivement dans les menus.
3. Impliquez toute la chaîne: le succès dépend d'un engagement commun, d'une vision claire et d'une communication claire entre les élèves, les parents, les agriculteurs et les cuisiniers.

Pour plus d'informations, veuillez contacter Marijke Van Ranst de BioForum vzw: marijke.vanranst@bioforum.be.

Toutes les photos : merci à Anastasia Lundqvist