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"D'accord, on n'écoute pas les fabricants de tabac, mais pourquoi pas nous?"

Interview avec Yannick Gyssens, président de Perstablo

Yannick Gyssens
Yannick Gyssens, ici dans son magasin Gyssens & Co à Termonde, est président de Perstablo depuis plus de 10 ans

Après notre entretien avec Xavier Deville, président de Prodipresse, nous sommes allés rendre visite à son homologue flamand Yannick Gyssens, président de Perstablo depuis plus de 10 ans. Nous voulions également entendre ce qu'il avait à dire sur l'avenir des librairies-presse et sur les nombreux dangers qui guettent. Une conversation sur les aides à la presse, la politique fiscale sur le tabac et les jeux d'argent ...

Presse

Il a fallu du temps, mais un accord a été trouvé sur la distribution des journaux et les subventions qui y sont associées. "Malheureusement, force est de constater qu'une fois de plus, les librairies-presse ont été oubliées dans toute cette histoire", affirme Yannick. "Une fois de plus, on n'a pas tenu compte de l'impact économique pour les librairies-presse. Alors qu'en tant que fédération, nous avons demandé au ministre concerné et au cabinet d'entamer le dialogue avec nous, ils viennent encore de prendre une décision qui affecte des milliers de librairies-presse indépendantes."

Détour

"Il s'agit simplement d'une continuation des subsides comme avant, mais l'argent arrive maintenant par un détour à Bpost, via les éditeurs. Il est temps que le gouvernement pense aussi à tous ces vendeurs de presse indépendants qui travaillent chaque jour dans leur magasin et qui doivent se battre pour garder la tête hors de l'eau. S'il s'agit d'une économie considérable, comme le prétend le Premier ministre, il est peut-être temps de compenser enfin le préjudice que les librairies-presse subissent depuis des années à cause de ce subside. Sur les quelque 1.650 libraires indépendants que compte encore la Belgique, seuls 500 à 600 arrivent difficilement à garder la tête hors de l'eau. Soit seulement 1 sur 3!"

Frais de transport

"Le seul point positif du nouvel accord relatif à la distribution de journaux est que les frais de transport sont déductibles à hauteur de 180%. Ce n'est pas beaucoup, cela rapportera entre 250 et 300 euros par an, mais c'est déjà ça. Les subventions n'auraient jamais dû être accordées en 2014. Aujourd'hui, il est de toute façon trop tard pour cet élément des trois piliers traditionnels."

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Pourquoi continuer à acheter un journal chez le marchand de journaux quand on peut le recevoir directement dans sa boîte aux lettres pour un tiers du prix en magasin?

Tabac

"Le système d'accises sur le tabac doit être réformé de toute urgence en s'inspirant du modèle français", estime Yannick. "Les représentants du gouvernement affirment que nous touchons 7 à 8% du prix ? Désolé, mais ils ne connaissent pas la réalité. Les marges sur les ventes de tabac pour le vendeur final sont historiquement basses. Sur un paquet de 10 euros aujourd'hui, cela représente à peine quelques centimes d'euros bruts."

Historiquement faibles

"Chaque fois que les accises sur le tabac augmentent, la commission sur les ventes pour le vendeur final, en l'occurrence les librairies-presse, diminue. Chaque augmentation entraîne un nouveau calcul de la commission et c'est le vendeur final, c'est-à-dire le marchand de journaux, qui voit sa part du gâteau diminuer. Il y a encore quelques années, nous touchions en moyenne 8% brut, aujourd'hui nous sommes à moins de 3% en moyenne."

Sur un paquet de cigarettes de 10 euros, 87% sont des taxes. Si l'on y ajoute la taxe SUP (Single Use Plastic) imposée par l'Europe aux fabricants, on arrive même à environ 89%. Il reste donc 11%, soit 1,10 €, à répartir entre le fabricant, le grossiste et le détaillant. Chaque fois que les accises augmentent, la part de profit du détaillant diminue.

"Au final, il nous reste entre 0,50 et 3% de commission brute sur un paquet de cigarettes vendu environ 10 euros, en fonction de la marque et de la quantité. C'est du jamais vu. Aucun produit n'est vendu avec une marge bénéficiaire aussi faible. Pire: si le client paie par carte bancaire, le détaillant risque de vendre à perte. Il n'y a pas d'autre produit légal qui soit aussi lourdement criminalisé."

Le modèle français

Yannick appelle donc à une réforme en profondeur du modèle d'accises sur ces produits. "D'accord, le gouvernement n'écoute pas les fabricants de tabac. Mais pourquoi pas nous? Il devrait faire en sorte qu'un pourcentage fixe de commission soit versé au vendeur. Ce système a fait ses preuves en France, où la marge brute est de +8%. Ce chiffre est révisé annuellement en fonction de l'évolution des prix et des accises. Nous souhaitons donc une rencontre avec les décideurs politiques pour trouver une solution et adapter ce modèle de rémunération pour les magasins de presse."

"Par ailleurs, en France, il n'y a pas de distinction entre le tabac à rouler et les cigarettes, ni entre une cigarette haut de gamme et une cigarette petit budget. Cette évolution est aussi inévitable. La différence de prix entre le tabac à rouler et les cigarettes a été totalement supprimée. Nous sommes également favorables à l'égalisation de tous ces produits afin d'obtenir une politique fiscale unique et un nouveau modèle de revenu pour le détaillant. Si c'est possible en France, pourquoi pas en Belgique?"

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Le tabac: aucun produit n'est vendu avec une marge bénéficiaire aussi faible

Cigarettes électroniques illégales

La fédération et son président mettent également en garde contre le phénomène des cigarettes électroniques illégales depuis un certain temps. Alors que le gouvernement rend presque impossible pour les magasins légaux de vendre ces produits de manière responsable, il ne met aucun obstacle à la vente en ligne. "Le gouvernement nous considère comme un croque-mitaine alors que nous sommes en fait un partenaire", explique Yannick. "Nous ne savons rien des produits en ligne. Ce sont des produits dont le contenu n'est pas vérifié, il n'y a aucun contrôle sur les acheteurs et nous ne savons pas combien il y en a en circulation, avec toutes les conséquences que cela implique."

"Le commerce en ligne de cigarettes électroniques illégales est endémique et nous avons lancé de nombreux avertissements à ce sujet par le passé. Mais nous nous heurtons à chaque fois à un mur. Bien que nos ventes soient de plus en plus difficiles, rien n'est entravé en ligne. Bien sûr, il est plus facile de nous imposer des règles et des restrictions que de s'attaquer au circuit illégal."

Pourtant, la librairie-presse est le partenaire idéal pour une vente responsable de ces produits, au même titre que les autres produits du tabac et de la nicotine, l'alcool, les jeux d'argent, etc. Les détaillants connaissent la gamme et les produits et ils peuvent éduquer leurs clients sur les risques qu'ils encourent."

Perstablo vise à créer un canal de vente protégé pour ces produits. Ainsi, les jeunes ne seront pas en contact avec ces produits, mais les fumeurs adultes pourront se rendre dans un environnement où les produits leur seront expliqués et où les vendeurs pourront les orienter vers des alternatives moins nocives à la cigarette. Avec B18, une charte déjà signée par plus de 220 magasins, les clients peuvent également s'en rendre compte visuellement.

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Les marchands de journaux sont le partenaire idéal pour une vente responsable de produits de vapotage

Produits de loterie et paris sportifs

Enfin, Yannick a souhaité s'exprimer concernant les jeux d'argent dans les librairies-presse. Selon Melissa Depraetere, présidente de Vooruit, les jeux d'argent n'ont pas leur place dans un magasin de journaux et devraient donc être interdits.

"Une fois de plus, un secteur entier est attaqué avec une idée farfelue sans que la fédération n'ait eu l'occasion de dialoguer. Madame Depraetere ne semble manifestement pas en faveur des librairies-presse. Une mesure lancée à l'époque comme une infime compensation pour la subvention relative aux journaux pour Bpost, qu'elle veut aujourd'hui abolir. On l'entend parler de 'pseudo-librairies' qui abusent de ce système. Eh bien, occupons-nous de ces pseudo-librairies. C'est ce que nous demandons depuis des années en tant que fédération. Mais n'optez pas pour la solution de facilité en ciblant tout un secteur qui est déjà en difficulté."

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Selon Melissa Depraetere, présidente de Vooruit, les jeux d'argent n'ont pas leur place dans un magasin de presse

"Le gouvernement devrait mieux définir légalement ce qu'est une librairie-presse. De cette manière, on pourra s'attaquer aux tricheurs qui veulent abuser du système pour proposer des jeux d'argent. Je demande à madame Depraetere de travailler sur une définition des magasins de presse et d'opter enfin pour une bonne solution au lieu d'une solution facile."

La solution?

Aujourd'hui, il y a beaucoup trop de concurrents pour le marchand de journaux. Le tabac, les produits de loterie, les journaux et les magazines sont désormais vendus partout. De plus, il y a 20 ou 30 ans, il n'y avait pas de succursales de supermarchés dans les petites villes; le marchand de journaux détenait quasiment le monopole. Ce n'est plus le cas aujourd'hui. "La solution est de se spécialiser et de se diversifier. Stagner, c'est reculer. On ne peut pas faire autrement", conclut Yannick.

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Écrit par Dimitri Van Moerkercke
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