Perspectives pour le secteur de la boulangerie
Rabobank dresse les perspectives économiques lors d'un événement organisé conjointement par l'Unifa, la FGBB et l'ARMB
Début juin 2024, l'Unifa, la Fédération des grandes boulangeries de Belgique et l'Association royale des meuniers belges ont organisé une présentation sur les perspectives économiques du secteur de la boulangerie chez Fosbury & Sons à Watermael-Boitsfort. Cyrille Filott a pris la parole pour présenter aux participants les conclusions des analyses de Rabobank.
Un écosystème solide
Les présidents de l'Unifa, de la FGBB et de l'ARMB ont également accueilli les participants à cet événement des trois associations. Nathalie De Grauwe (Unifa) a parlé de l'emploi et de la législation sur le pain, les deux plus grands défis pour le secteur qui regorge de personnes passionnées et compétentes. Nathalie Siccard (FGBB) a souligné la nécessité de travailler ensemble pour soutenir nos entreprises saines avec de bons produits, en se référant au Mémorandum Fevia 2024 avec 15 propositions. Pour Guy De Mol (ARMB), l'organisation de l'événement par les 3 organismes est une preuve de l'écosystème fort que forme le secteur de la boulangerie. Il souhaite également atteindre des objectifs communs pour ce secteur au niveau européen.
Marché et mouvements boursiers
Cyrille Filott a commencé sa conférence sur les perspectives par sa propre impression des mouvements du marché et ses observations lors du salon PLMA (Private Label Manufacturers Association) à la fin du mois de mai 2024. En tant que Global Sector Strategist Consumer Foods chez RaboResearch Food & Agribusiness (qui emploie près de 100 analystes), il est naturellement particulièrement bien placé pour saisir ces courants et tendances.
Il a dressé un tableau des nombreuses acquisitions récentes dans le secteur, qui se sont distinguées dans toute l'Europe. La conclusion est qu'après une période pour le moins marquée par diverses turbulences (la pandémie de COVID-19, entre autres), on assiste à un regain d'activité de la part d'entreprises principalement plus grandes qui se consolident ou s'étendent. Nombre d'entre elles optent pour cette consolidation afin de (continuer à) bénéficier d'économies d'échelle.
Lors du salon PLMA à Amsterdam, Filott a constaté que la situation des consommateurs est mitigée. En ce qui concerne les produits, il semble que plus c'est petit, mieux c'est: les consommateurs veulent se faire plaisir, mais en plus petites portions et sont prêts à payer un prix plus élevé. Le développement de nouveaux produits n'a pas répondu aux attentes, car avec un budget plus faible, les marques de distributeurs sont plus souvent choisies. Selon l'expert, l'emploi reste également une question délicate. Enfin, M. Filott a également noté que le développement durable est principalement une question B2B; les détaillants le demandent, mais tous les consommateurs ne sont pas concernés. Par conséquent, les consommateurs ne sont pas disposés à payer davantage pour des produits durables. Ces cinq observations concises se sont également reflétées dans les thèmes qui ont été abordés par la suite.
Perspectives modérées pour les consommateurs
Par ailleurs, le niveau de revenu en Europe ne semble pas encore avoir retrouvé son niveau de 2019, sauf en Belgique (grâce au saut d'index).
La confiance des consommateurs se rétablit et la consommation privée recommence à croître de manière prudente. La légère baisse de l'inflation est bénéfique pour les consommateurs. Toutefois, les consommateurs restent très sélectifs et leurs choix ne sont pas toujours faciles à prévoir sur la base d'informations historiques. Il existe une nette préférence pour l'expérience. Après les restrictions de la période Covid et l'accent mis sur l'achat de biens, un changement clair est maintenant perceptible en faveur, par exemple, des voyages internationaux, des voyages nationaux et des visites de restaurants. Ce changement de mentalité est à surveiller.
Les coûts (toujours) plus élevés
En termes de coûts, la période actuelle n'est pas réjouissante; la volatilité de diverses matières premières est préoccupante. Dans le cas du cacao, par exemple, les conditions météorologiques (climat) ont entraîné une baisse de la récolte, ce qui a provoqué un déséquilibre entre l'offre et la demande. La spéculation des entreprises qui ne vendent pas leurs stocks ne fait que renforcer ce déséquilibre et fait grimper les prix. Le beurre et les céréales connaissent également des prix records. Avec des revenus stables, des coûts de production égaux ou en hausse et une augmentation des autres coûts, des amortissements et des dépréciations, le compte de résultat de l'industrie reste sous pression.
Heureusement, il y a aussi des exceptions qui confirment la règle. Individuellement, les entreprises performantes font la différence grâce à des gains d'efficacité.
Les changements démographiques méritent notre attention
Le vieillissement de la population n'a pas non plus échappé à l'attention de RaboResearch Food & Agribusiness. Cette tendance prend de l'ampleur et les prévisions annoncent des défis encore plus importants, en particulier pour le Sud. Le vieillissement de la population signifie que pour un même nombre total de personnes, le nombre de personnes disponibles sur le marché du travail diminue. Et s'il existe déjà de nombreux postes vacants qui ne peuvent être pourvus, cela en dit long sur les perspectives en la matière ...
Mais là où il y a des défis, il y a aussi des opportunités. Un public vieillissant a également des besoins différents, auxquels il est possible de répondre intelligemment. La commodité est au premier plan, mais il faut aussi penser à ajouter des nutriments et à adapter le marketing ...
La durabilité cherche sa place dans le débat
En matière de durabilité, un curieux changement d'attitude attire l'attention. Alors qu'en 2020, de nombreuses entreprises parlaient encore d'objectifs ambitieux en matière de développement durable, vers 2022, l'attention s'est également déplacée vers la réduction des risques: la survie de l'entreprise. Deux ans plus tard, l'accent est de nouveau mis sur le retour sur investissement. Par conséquent, de nombreuses entreprises revoient aujourd'hui à la baisse leurs objectifs en matière de développement durable, voire renoncent à toute promesse. L'évaluation est que d'ici 2026, nous nous trouverons bien au milieu du triangle, où la durabilité, le risque et le rendement seront harmonieusement équilibrés.
ET L'INTELLIGENCE ARTIFICIELLE, DANS TOUT ÇA?
À la suite d'une question du public sur l'intelligence artificielle, Cyrille Filott a ajouté un autre prolongement à son exposé. Le stratège sectoriel mondial de Consumer Foods a divisé les façons dont l'IA façonnerait les affaires dans le secteur de la boulangerie en trois blocs: l'efficacité opérationnelle, le marketing/l'expérience client et le développement de nouveaux produits.
En termes d'efficacité opérationnelle, l'IA pourrait être d'une grande aide pour prévoir la demande et gérer les stocks. En outre, le contrôle de la qualité et la réduction des déchets peuvent également bénéficier des avantages de l'intelligence artificielle.
Du point de vue du marketing et/ou de l'expérience client, l'IA peut contribuer à renforcer le dialogue avec les clients, notamment grâce à un contenu hyperpersonnalisé et à des promotions ciblées. Elle peut également avoir un impact positif sur l'optimisation de l'aspect créatif. L'intelligence artificielle offre également des avantages prometteurs pour le développement de nouveaux produits. Il suffit de penser à la prévision des tendances et à l'innovation en matière de saveurs, de goûts et de textures. En outre, l'IA peut également contribuer aux formulations fonctionnelles et à la recherche d'ingrédients durables.
Lorsqu'on lui a demandé directement si l'IA allait changer la donne, Cyrille Filott a indiqué qu'il considérait l'IA comme un facilitateur plutôt que comme quelque chose qui changerait radicalement la situation.
Images et graphiques: conférence Cyrille Filott (RaboResearch Food & Agribusiness, Rabobank)