Le bureau d'architectes en tant que réseau
LINK LAB VOIT LA VILLE COMME UN TERRAIN DE JEU
Le bureau d'architectes Link Lab de Courtrai n'est pas un bureau comme les autres. Et ce pour plusieurs raisons. L'une d'entre elles est son intention et son large désir de partager les connaissances. L'architecte fondateur Tom Vandorpe et son équipe font preuve d'énergie et d'optimisme. Link Lab travaille de manière multidisciplinaire et parvient à voir les possibilités. Des projets sont déjà en cours en France. "Nos missions sont merveilleusement variées", déclare l'architecte avec enthousiasme.
La conversation s'ouvre sur un phénomène frappant, que Vandorpe apprécie à certains égards: le penchant pour l'architecture du passé. L'architecte Tom Vandorpe: "Je constate que l'architecture en brique revient sur le devant de la scène. Ce phénomène n'est pas forcément dicté par un lobby, je vois beaucoup de jeunes architectes qui travaillent avec la brique aussi bien pour la construction neuve que pour la rénovation."Nous rencontrons Tom Vandorpe dans un immeuble de bureaux aéré et lumineux situé sur la Veemarkt à Courtrai. La place de la ville s'étend à nos pieds et évoque d'emblée l'adage du bureau, 'The City is our Playground'. L'idée consiste à utiliser l'espace de manière durable et à remplir la ville de de façon intelligente et attrayante.
"Les techniques de construction traditionnelles se perdent en raison de la disparition du savoir-faire traditionnel"
savoir-faire
Les techniques anciennes subissent une pression et, paradoxalement, c'est ce qui fait qu'elles attirent l'attention. Les techniques de construction traditionnelles se perdent en raison de la disparition du savoir-faire traditionnel. Tom Vandorpe: "Il y a une certaine nostalgie du passé, du savoir-faire de l'artisan, et c'est cette image qui revient au premier plan, celle de l'architecte - artisan. On voit des architectes qui prêtent attention à une matérialité raffinée et qui se concentrent sur les qualités d'un savoir-faire poussé. Je pense que la connaissance des matériaux est une bonne chose mais Link Lab préfère réfléchir à la manière dont il peut concevoir pour l'avenir."
Selon Vandorpe, il existe un contre-mouvement, diamétralement opposé aux architectes 'rock stars' qui se lancent dans l'architecture d'objet. L'architecte Tom Vandorpe: "Désormais, un concept comme le style architectural est dépassé. Il y a tellement de facteurs qui le contrecarrent! Le contexte n'est jamais le même et le client non plus. Il s'agit toujours d'un projet sur mesure. Je considère l'architecture comme un service, nous faisons de facto partie du secteur des services. Nous voulons satisfaire les demandes des clients. Le client a un besoin ou un rêve, et nous lui apportons la meilleure réponse possible. Je vois beaucoup de bureau d'études intéressants, très créatifs et qui font bien leur travail - la conception mais aussi le suivi de chantier."
"Les architectes sont obligés d'être au service complet du promoteur"
prestige
Vous êtes issu d'un horizon différent?
Tom Vandorpe: "Ce fut un énorme défi pour moi de commencer un nouveau projet après ma période chez B2Ai. J'ai été confronté à la question: et maintenant, que faire? Sur quoi allons-nous mettre l'accent et quelle est notre valeur ajoutée? Nous nous sommes lancés dans cette aventure. Mais sur le plan organisationnel, nous avons pris des positions claires." Chez Link Lab, cela vient des tripes; les employés ont leur mot à dire et peuvent évoluer au sein de l'organisation. La mentalité de l'architecte qui décide de tout est totalement absente de ce bureau. Tom Vandorpe: "Il s'agit d'un phénomène plutôt rare et en voie de disparition. Autrefois, l'architecte avait une certaine responsabilité, c'était quelqu'un qui avait du prestige. Mais aujourd'hui, nous avons affaire à une perception opposée. Les architectes sont obligés de se mettre entièrement au service du promoteur, qui - c'est compréhensible - cherche à obtenir un rendement maximal. Et ce n'est pas idéal non plus. Link Lab veut créer des espaces sur mesure pour les gens. C'est pourquoi nous recherchons également une harmonie au niveau du contenu avec le promoteur. Il arrive trop souvent qu'un promoteur fasse appel à plusieurs petits bureaux et, ce faisant, exerce une pression énorme sur les prix et les honoraires. Pourquoi? Parce que les petits bureaux travaillent davantage sur le contenu et ne sont pas toujours à la hauteur des exigences de la machine bien huilée du promoteur. Le promoteur veut une belle image afin de pouvoir convaincre ses parties prenantes - clients, ville, commune... - mais le manque de dialogue entraîne des projets clichés. Link Lab n'hésite pas à associer des idées et des lieux. Nous sommes une 'plateforme' dans le sens où, en tant que petit bureau, nous établissons des liens - d'où le nom de Link Lab - avec d'autres petits bureaux, en fonction du projet. De cette façon, nous pouvons mettre en commun notre savoir-faire."
Base Link Lab
L'architecte Tom Vandorpe, cofondateur de Link Lab: "Nous réalisons des projets en mettant en relation des experts de différents horizons dans un processus de co-création. Nous allons au-delà des disciplines traditionnelles que sont l'architecture, l'urbanisme, la décoration d'intérieur et l'architecture paysagère. Nous nous efforçons d'adopter une approche ouverte, collaborative et curieuse. En impliquant d'autres disciplines telles que la communication, la gestion des processus ou la sociologie, nous créons des projets socialement engagés."
Architecture artistique
Les architectes peuvent-ils reconquérir le terrain qu'ils sont en train de perdre?
Tom Vandorpe: "La question est de savoir quel est ce terrain, aujourd'hui. Il y a des bureaux qui accordent une grande importance à l'architecture artistique, de l'architecte-artiste. Si vous construisez de l'art, vous êtes un artiste, pas un architecte. Je ne crois pas que l'on puisse occuper une position entre les deux. L'architecture répond à une demande claire."
Projets variés
Comment se fait-il que les projets de Link Lab soient aussi diversifiés?
Tom Vandorpe montre avec enthousiasme un projet de restauration de Gand intégrant un vieux vitrail. "Il s'agit d'un projet très cool dans un petit bâtiment. Grâce à cette réalisation, plusieurs exploitants horeca de Gand sont venus s'adresser à nous. C'est ainsi que nous parviennent des projets très divers. Notre coopération avec le bureau de décoration d'intérieur Stay Studio se passe très bien, c'est une entreprise sympathique qui a beaucoup d'expérience dans le secteur horeca. Cette coopération correspond parfaitement à notre philosophie. A proprement parler, nous sommes un bureau d'architecture, mais nous voulons aussi être le centre d'un réseau de petits bureaux. Cela nous permet, contrairement aux grands bureaux, de réaliser aussi bien des petits projets sympas que des projets plus importants. Nous pouvons facilement faire face à une mission comportant, par exemple, 100 appartements. Dans ce cas-là, nous colaborons avec d'autres petits bureaux."
Arbre de Noël design
Link Lab a son siège à Courtrai (un petit bureau a récemment été ouvert à Lille), une ville qui, ces dernières années, a connu une véritable métamorphose. Vandorpe: "C'est surtout parce que les travaux de la Lys sont terminés. Et la gouvernance dynamique de la ville y est aussi pour quelque chose. Aujourd'hui, Courtrai veut être une métropole, et non plus seulement associée au design, comme ce fut le cas pendant longtemps. Cette ville ne se limite pas à un arbre de Noël design sur la Grand-Place. Courtrai fait partie de l'Eurométropole mais la ville n'a jamais pleinement saisi cette opportunité. Le métro de Lille aurait dû être prolongé jusqu'à Courtrai. C'est aussi simple que cela. Avec notre petit bureau à Lille, nous voulons réaliser ce lien sur le plan architectural."
quelques PROJETS à l'honneur
Sanapolis : parc de santé (Sijsele)
Link Lab, en collaboration avec M4 Architects et Art & Build, a remporté le concours pour le parc de santé Sanapolis à Sijsele. L'ancien sanatorium pour la tuberculose datant de l'entre-deux-guerres deviendra bientôt un parc de santé naturel et récréatif. L'équipe a surtout remporté ce concours en raison de son élaboration conceptuelle, avec une utilisation durable et intelligente de l'espace. Le fait d'impliquer un maximum de parties prenantes dès le début a permis de mieux saisir les souhaits et les idées d'un large groupe de parties prenantes et de spécialistes. De cette manière, l'équipe est parvenue à une description complète du projet.
IESEG School of Management (Lille)
Au coin d'un boulevard très fréquenté de Lille, l'IESEG School of Management trouvera ses tout nouveaux locaux dans un environnement dynamique, respectueux et ouvert sur la ville. Il y a onze niveaux, dont trois au sous-sol. La solution d'angle attirant le regard côté rue est tout aussi frappante que les escaliers monumentaux et les auditoriums intégrés. La densité du site sera largement compensée par des plantations et de la verdure à tous les étages. Le bâtiment est conçu pour une interaction dynamique entre les étudiants.
Kaskade (Courtrai)
Jusqu'à récemment, le Handelskaai de Courtrai était une périphérie peu attrayante du centre ville. Les quais avaient été réduits à une zone de stationnement à plusieurs endroits. Lorsque, au début des années 1990, les travaux d'infrastructure ont commencé à améliorer la voie navigable, le conseil communal a saisi l'occasion de renforcer l'interaction avec le fleuve. La construction de nouveaux ponts et le réaménagement des espaces publics ont offert aux promoteurs la possibilité de développer l'immobilier le long de la Lys.
La recherche conceptuelle pour Kaskade - un projet résiduel comprenant 26 logements - s'est principalement concentrée sur une échelle équilibrée de la façade dans son contexte spécifique. La conception de la façade est remarquable pour son "parcellement", une segmentation verticale qui évoque l'idée de parcelles différentes et contiguës. Ce principe est renforcé par la variation de la largeur de la façade et la diversité des matériaux.
