QUAND PLUS AUCUN MANUEL NE SUFFIT

Une conception particulièrement économe en énergie, où tous les aspects de la durabilité entrent en ligne de compte. C’est ainsi que le jury d’experts des Sanilec Awards 2019 a décrit le nouveau centre de distribution de Van Marcke à Aalbeke. Jan Pieter Somers, responsable HVAC et Sanitaire chez Van Maele, qui a assuré l’exécution des installations techniques, a donc pu recevoir fièrement début avril le trophée dans la catégorie Energie Renouvelable. Avec Aldric d’Oultremont et Tom Prinzie, respectivement Project Manager et Project Manager Techniques chez Van Marcke, il revient sur les principaux défis du projet.

Premiers pas dans l’industrie

“Ce n’était pas un projet classique pour Van Maele”, laisse directement entendre Somers. “En tant qu’entreprise d’installation, nous avons surtout historiquement de l’expérience avec les hôpitaux et les établissements de soins. Ce sont certes aussi des projets à grande échelle, mais les consommateurs mêmes sont généralement plus petits et les points à prendre en compte très différents. Le marché changeant et les marchés dans ce segment se faisant rares, nous tentons toutefois depuis quelques années de nous diversifier plus. L’EDC est un des premiers projets industriels de notre portefeuille, mais nous avons su de suite que nous répondrions à la demande d’offre. Van Maele est depuis plus de 50 ans client chez Van Marcke, et c’est un honneur de pouvoir sceller ces années de collaboration avec ce projet.”

DE BEO A ANB

Trois cœurs battants

Au cœur de cette quête de durabilité, on retrouve notamment l’aménagement de l’un des plus grands champs BEO (stockage d’énergie par forage) du Benelux. Geothermie Verbeke a réalisé pour cela 518 forages sur le terrain, avec chacun une profondeur de 66 m. “L’eau glycolée circulant par les sondes entre dans le bâtiment dans le local des pompes”, explique Somers. “Il s’agit du cœur battant de l’instal­lation. Trois pompes installées parallèlement veillent à ce que toute cette énergie – toute cette eau glycolée – soit ensuite répartie à travers le bâtiment vers autant de sous-stations: une pour la zone ‘inbound’, une pour la zone ‘outbound’ et une pour la partie ‘bureaux’.”

Chauffage

Depuis les sous-stations, les différentes zones sont chauffées. “Les sous-stations de l’inbound et l’outbound sont dotées chacune pour cela d’une pompe à chaleur géothermique; dans la grande sous-station, il y en a trois”, déclare Somers. Le noyau du bâtiment n’est pas chauffé activement, mais via l’inertie.

A travers les autres espaces, divers systèmes de dégagement sont utilisés. “Dans les bureaux paysagers, nous avons utilisé des plafonds climatisants”, précise Aldric d’Oultremont, Project Manager. “Une activation du noyau de béton (ANB) est prévue au niveau des deux quais de chargement, il y a des convecteurs dans les locaux de formation et il y a encore le chauffage par le sol – des systèmes fonctionnant tous à un régime à basse température et donc parfaitement compatibles avec les pompes à chaleur.”

Refroidissement passif

Le caractère réversible de tous les systèmes de dégagement est, selon Tom Prinzie, Project Manager Techniques, au moins aussi important. “Le bâtiment est rafraîchi complètement via la même voie. Nous avons opté délibérément pour un refroidissement uniquement passif: quand un rafraîchissement s’impose en été, les pompes à chaleur sont by-passées et le froid du sol (et donc du mélange glycolé) est transmis via un échangeur thermique à plaquettes à l’eau de circulation.”

Un certain nombre de sécurités ont tout de même aussi été intégrées. “Sur l’extraction, nous avons prévu un refroidissement adiabatique pour soutenir le free cooling, et au niveau des groupes d’air, une seule pompe à chaleur réversible a été placée. En cas d’extrême urgence, elle peut sans aucun doute assurer un refroi­dissement actif.”

Eau chaude sanitaire

Des chauffe-eau solaires assurent, enfin, la pré­paration d’eau chaude sanitaire. “Le choix de chauffe-eau solaires au lieu de chauffe-eau à pompe à chaleur trouve notamment son origine dans l’histoire BREEAM”, explique Prinzie. “Elle impose, en effet, d’utiliser d’abord le plus possible l’énergie solaire. Pour le post-chauffage éventuel de l’ECS, nous utilisons par ailleurs d’abord la chaleur provenant des chaudières de notre local de formation. Les deux autres chaudières ne se mettent en marche qu’ensuite.”

ENTRE REVE ET REALITE

D’après les responsables du projet, la quête des scores BREEAM maximaux a marqué le projet de plusieurs manières. “Pour de nombreuses choses implémentées ici, il n’existe pas de solutions ou produits prêts à l’emploi”, précise Prinzie. “Tout a dû être conçu par le bureau d’études.”

“Ce qui semble bien sur papier, n’est toutefois pas toujours évident dans la pratique”, ajoute d’Oultremont. “Il a fallu une belle dose de concertation, entre toutes les parties, pour concrétiser ces projets et pouvoir placer les bons produits en la bonne combinaison au bon prix.”

Sondages de reconnaissance

“A un moment donné, il n’y a simplement plus non plus de manuels”, poursuit Prinzie. “C’est pourquoi nous avons p.ex. prévu deux sondages de reconnaissance supplémentaires dans le champ BEO. Un câble en fibre optique y mesure à chaque demi-mètre la température du sol. Nous pouvons ainsi voir comment ce champ BEO fonctionne réellement: forages fonctionnant indépendamment, ou une grosse batterie?”

Dilatation linéaire

Une des plus grosses incertitudes pour Somers était la dilatation thermique des tuyaux dans le magasin. “Il s’agit ici de distances jusqu’à 250 m, en une ligne droite, et de différences de température de 4 °C à la température ambiante. Cela est rare en Belgique. Ajoutez à cela les nombreux obstacles à passer – sprinklers, … – et vous vous retrouvez face à un défi énorme. J’ai donc dû demander conseil à divers fabricants et spécialistes. Une rude école, mais des connaissances que je pourrai à présent aussi exploiter pour d’autres projets.”

L’instant de vérité

L’instant de vérité absolu a cependant été pour toutes les parties impliquées le démarrage des pompes. “Même le bureau d’études a déclaré à ce moment que ses connaissances allaient être approfondies”, s’esclaffe Prinzie. Le démarrage n’était, en effet, possible qu’une fois tout installé correctement et l’installation complètement purgée.”

“Comme tout se trouve sur le même circuit, tout le système risque de se retrouver sans pression en cas de fuite et les pompes risquent de casser”, explique Prinzie. “Le fait que le circuit implique différentes parties – le champ BEO à l’extérieur était la responsabilité de Geothermie Verbeke et tout à l’intérieur celle de Van Maele – ne simplifiait, en outre, pas du tout les choses. Nous devions bien savoir qui avait rempli, qui purgeait, … Ici, communication et concertation étaient essentielles.”

“Vous parcourez une check-list et quand vous pensez que tout est bon, vous devez prendre vos responsabilités”, déclare Somers. “Vous n’avez alors plus d’autre choix que d’appuyer sur le bouton.”

INSTALLATION CONFORTABLE ET EFFICACE

Une installation technique en guise d’expression d’ambitions de durabilité ... ce n’est pas une sinécure. Pourtant, cela comportait aussi, selon Somers, des avantages. “En général, tout devient plus petit dans la construction, mais ici, c’était l’inverse. Comme les locaux techniques doivent aussi servir de show-room, assez de place a été prévue partout. Dans chaque sous-station, il y a p.ex. de larges couloirs autour des installations, ce qui simplifie énormément l’installation comme la maintenance.”

L’organisation des installations techniques en trois sous-stations, commandant chacune une zone distincte, a aussi renforcé l’efficacité de l’exécution. “Grâce à cette construction logique, nous avons pu travailler par phases, zone par zone, et nos équipes ont pu avancer petit à petit et laisser la place à d’autres partenaires de construction. Nous avons ainsi toujours pu respecter le planning établi, et comptons bien respecter aussi les derniers délais – les bureaux seront livrés cet été.”