Quelles interventions post-inondation sur une structure en bois?
Les inondations des dernières mois ont eu de lourds impacts dans notre pays. Afin d’assurer la pérennité des bâtiments et de préserver la santé de leurs occupants, il convient d’assécher au plus vite les structures et, au besoin, de remplacer les isolants. Cette étape est cruciale dans le cas d’une structure en bois.
Les inondations engendrent de multiples dégâts dans une maison et ce, à différents niveaux. On prêtera une attention particulière aux conséquences indirectes liées à l’absorption d’eau par les éléments constructifs, en particulier dans le cas d’une structure en bois. Au cours d’une inondation, l’eau va principalement s’accumuler dans les parties basses de la maison (cave, rezde-chaussée), mais elle peut également se propager sur quelques dizaines de centimètres dans les parties supérieures par capillarité.
Le principal problème ne tient pas tant au fait que la structure en bois soit humide, mais bien qu’elle le reste pendant une longue période (risque de dégradation biologique). Les isolants de la paroi peuvent également subir des dégradations ou un tassement, et retenir une grande quantité d’humidité. Les mesures explicitées ci-après doivent être prises assez rapidement dans les semaines suivant le sinistre pour éviter toutes dégradations ultérieures irréversibles. Il convient également d’avertir préalablement l’assureur et de documenter par des photos les interventions envisagées.
Trois étapes fondamentales doivent être considérées:
- Diminuer la charge d’humidité;
- Ouvrir les parois pour évaluer les dégradations ainsi que la nature de l’intervention;
- Remettre la structure en état.
Comment réduire la charge d’humidité?
Pour évacuer l’humidité d’une structure en bois, on peut avoir recours aux techniques suivantes:
- Drainage et pompage de l’eau, y compris dans le vide ventilé, la cave, les espaces techniques …
- Aération naturelle intensive et remise en fonctionnement des dispositifs de ventilation;
- Évacuation des éléments qui ont accumulé de l’humidité et qui y sont sensibles (revêtements …).
L’évacuation de l’humidité des matériaux peut prendre plusieurs semaines, voire plusieurs mois, en fonction de la porosité des matériaux et du système de ventilation présent. Selon la taille et la géométrie des locaux, il peut s’avérer nécessaire de faire usage de ventilateurs mécaniques complémentaires ou d’un dessiccateur (ou déshumidificateur). L’air doit circuler dans toute l’habitation, y compris dans les zones qui n’ont pas été inondées.
On peut également accélérer l’évaporation de l’humidité en augmentant la température intérieure du bâtiment. La mise en route du chauffage peut ainsi être envisagée, si les conditions de sécurité le permettent. Il convient toutefois de ne pas chauffer exagérément ni trop rapidement, au risque d’occasionner des fissures dans les éléments constructifs.
La ventilation est également indispensable pour éviter tout risque sanitaire. En effet, la présence d’une humidité élevée au sein d’une habitation est propice au développement de moisissures et autres microorganismes, pouvant engendrer des problèmes de santé pour les occupants (asthme, allergie …). Au cas où des moisissures sont présentes, il est indispensable de porter un équipement adapté (masque, gants …) lors des travaux d’assainissement (voir à ce sujet Les Dossiers du CSTC 2015/2.9).
Ouverture des parois – Evaluation des dégradations et de la nature de l’intervention
L’ouverture des parois doit permettre le séchage de celles-ci et l’évaluation des dégradations. Les mesures suivantes devront être envisagées:
- Si l’ouverture se fait par l’intérieur, l’étanchéité à l’air et à la vapeur d’eau devra être démontée; si elle se fait par l’extérieur, il faudra procéder à l’enlèvement du pare-pluie;
- L’isolant humidifié doit presque systématiquement être éliminé. On accordera une attention particulière aux isolants capillaires (fibre de bois, cellulose, …), qui peuvent absorber l’humidité et subir un tassement très important. Ces matériaux ne pourront donc pas être récupérés. Certains autres isolants peuvent être réutilisés à condition qu’ils conservent leurs caractéristiques après séchage (densité, cohésion, …);
- les parements de finitions intérieures sensibles à l’humidité qui ont été inondés doivent être démontés jusqu’à une hauteur de 30 cm au-dessus de la limite atteinte par l’eau. Les matériaux humides de type carton, gypse, … peuvent être le siège de moisissures et de champignons. La présence d’eau peut également dégrader leurs propriétés mécaniques;
- Les panneaux de contreventement intérieurs ou extérieurs peuvent avoir perdu leurs performances mécaniques. Il est à noter qu’un panneau présentant un gonflement doit toujours être éliminé. Quant aux panneaux dégradés, ils devront tous être démontés sur une hauteur de 30 cm au-dessus de la limite atteinte par l’eau. Si le panneau contreventant semble fortement détérioré, un remplacement progressif devra être envisagé, afin de ne pas fragiliser mécaniquement la structure. Une étude de stabilité sera dès lors recommandée;
- Une structure portante à ossature en bois ou en CLT doit rester aérée jusqu’au séchage des éléments (humidité du bois <20%). Il est difficile de déterminer avec précision la durée d’assèchement, car elle dépend de nombreux paramètres (ventilation, taux d’humidité du bois, essence, section et surface exposée de l’élément, …). Cependant, à titre d’information, nous pouvons avancer un délai approximatif de 8 semaines pour des chevrons de 55 x 75 cm et de six semaines pour des éléments de 38 x 184 cm si ces derniers sont ventilés;
- Si le parement extérieur est constitué de matériaux sensibles à l’eau (ETICS sur fibre de bois, par exemple), l’ensemble du parement (enduit, isolant, …) qui a été mis sous eau doit être démonté et évacué. Dans ce cas, des mesures de protection contre les intempéries devront être mises en place, tout en veillant à ne pas entraver la ventilation et le séchage des éléments.
L’ensemble des interventions mentionnées ci-dessus sont également applicables aux planchers en bois partiellement ou totalement inondés. Durant la période d’assèchement, il est recommandé d’étançonner les planchers pour limiter leurs déformations ou leur flambement. Cette mesure ne pourra toutefois être envisagée que si la résistance mécanique des poutres est suffisante et que la descente des charges est assurée. Cela ne devrait pas poser de problème avec des éléments en bois massif, mais les éléments reconstitués peuvent contenir des matériaux peu ou pas résistants à l’humidité.
remise en état de la structure
Certains débits hydrauliques peuvent provoquer des efforts horizontaux importants entraînant des déformations ou le déplacement des parois. Il est donc important de vérifier les ancrages ainsi que la planéité et la verticalité des parois. Les parois constitutives d’une ossature en bois peuvent être refermées lorsque le taux d’humidité à coeur de l’élément est inférieur à 20% (voir Les Dossiers du CSTC 2013/1.4).
Exception faite des systèmes de type A3, les produits de préservation du bois qui ont été mis sous eau subissent un lessivage des agents actifs. A défaut de garantie de la part du fabricant, nous recommandons de réaliser un traitement préventif ad hoc par badigeonnage ou par aspersion sur l’ensemble des éléments de structure qui ont été inondés. Les panneaux doivent être remplacés par des éléments de performances similaires. Si les panneaux de contreventement ont été découpés, la résistance d’ensemble doit être rétablie en réalisant des ‘coutures’ de liaison mécanique entre les parties de panneaux (voir figure ci-dessus).
Les écrans d’étanchéité (pare-pluie, étanchéité à l’air, pare-vapeur) sont positionnés afin d’assurer la continuité de l’étanchéité avec les éléments en place. Si les membranes en pied de parois rejoignent le drainage extérieur de la fondation, il est nécessaire de vérifier si ces écrans d’étanchéité n’ont pas été obturés par les boues de l’inondation.
Les revêtements de sol extérieur et de façade en bois ne devront être remplacés qu’en cas de déformation ou de détérioration de leurs caractéristiques mécaniques. On ne pourra toutefois s’en assurer qu’une fois que les revêtements auront retrouvé leur humidité d’équilibre (17±2% pour les bardages et les terrasses en bois).