L'aqoustique dans les soins: une question complexe
Les bâtiments hospitaliers sont des environnements acoustiquement stressants
Les bâtiments hospitaliers sont, à différents titres, des bâtiments remplis de défis; également en ce qui concerne l'acoustique. Cela est dû en premier lieu à la nature spécifique et à l'usage des hôpitaux, mais aussi aux limitations en matière de choix de matériaux qui contribuent à la complexité de la question acoustique. Et pourtant, l'acoustique dans un environnement médical est d'une importance primordiale et il faut tout mettre en œuvre pour offrir un confort sonore tant aux patients qu'au personnel et aux visiteurs.
L'acoustique mérite plus d'attention
Cela semble évident: les patients et les occupants d'un établissement de soins ont besoin de calme et d'intimité. Pourtant, l'importance réelle d'une bonne acoustique dans de telles situations est souvent sous-estimée et on ne tient pas compte des conséquences possibles d'un environnement bruyant. Il y a, en effet, une accoutumance, et tant les causes que les conséquences font souvent partie de l'inconscience. Ce n'est pas parce que l'on n'est pas dérangé de manière active par le bruit, qu'il n'a pas d'effets sur le corps ou sur le mental.
Conséquences pour les patients et le personnel
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Selon l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS), la surcharge de bruit peut notamment avoir pour conséquences, des troubles du sommeil, une hausse de la tension artérielle, du stress, etc. A long terme, cela peut résulter dans un ralentissement du rétablissement et dans un séjour prolongé à l'hôpital, une augmentation de la médication, et même mener à des problèmes cardiovasculaires et autres complications médicales. De plus, la pollution sonore a aussi un impact négatif sur le personnel. Tout comme pour les patients, cela leur occasionne du stress qui peut entraîner une augmentation des maladies et une diminution de la qualité des soins. Enfin, une bonne compréhension orale entre patient et personnel est d'une grande importance, afin de garantir une communication efficace, tout en préservant l'intimité nécessaire. Les discussions doivent pouvoir se faire avec la discrétion adéquate.
Des normes limitées
Bien qu'une acoustique sous-optimale ait des effets probants sur la santé tant des patients que du personnel, il y a encore de nombreuses lacunes sur le plan des normes. C'est ainsi que les normes belges sur l'isolation sonore (NBN S 01-400) et sur les niveaux sonores (NBN S 01-401) datent respectivement de 1977 et 1987, et qu'elles ne posent aucune exigence sur le temps de réverbération acoustique et qu'aucune norme spécifique n’est définie pour les établissements de soins. En d'autres mots, des projets très récents ont été réalisés sur la base de très vieilles normes.
Avec une nouvelle norme en préparation, il y aura une amélioration. Celle-ci va se focaliser sur les maisons de repos et de soins ainsi que sur les hôpitaux et sera basée sur les mesures acoustiques définies par l'Europe. En principe, elle posera également des exigences sur les temps de réverbération acoustique et introduira des niveaux de prestations pour une exigence normale et élevée. Ce dernier point sera d'application pour des cibles spécifiques ou lorsqu'un haut niveau de confort acoustique est demandé.
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Un environnement acoustique stressant
Le fait que le confort acoustique dans les établissements de soins ne soit pas toujours optimal, n'est pas nécessairement dû à des normes (momentanément) limitées. Les établissements de soins sont, sur le plan acoustique, des bâtiments particulièrement difficiles. Il y a du mouvement 24h sur 24, 7 jours sur 7 et un nombre important d'activités différentes y ont lieu. Les nombreux utilisateurs – patients, personnel, occupants et visiteurs – ont de plus, des rythmes et des horaires différents, ce qui entraîne des conflits réguliers. Ajoutez-y encore un grand nombre d'appareils, et vous vous retrouvez avec un environnement sonore extrêmement chargé.
Zones d'attention
Les zones d'attention typiques dans les établissements de soins sont:
- Les couloirs et les passages: le couloir est sans doute un des points les plus critiques et urgents dans un environnement de soins. Non seulement parce qu'il y a beaucoup de bruit qui y est produit – pensez aux visiteurs, aux livraisons de repas, au transport des patients, … – mais aussi parce que le bruit peut se propager facilement dans ces longs couloirs très droits. Tant la géométrie des espaces que les matériaux rigides souvent utilisés assurent un long temps de réverbération acoustique, ce qui fait que les voix résonnent plus longtemps et que les bruits de fonds sont renforcés. Si, en plus, il n'y a pas d'isolation sonore entre le couloir et les espaces qui y donnent, ces espaces subiront également des nuisances. Les atriums, aussi, représentent un très important défi en matière d'acoustique. Les espaces sont non seulement grands et traversés par beaucoup de monde, ils sont également équipés d'un grand nombre de vitres. Cela signifie aussi qu'il y a une grande surface de matériaux réfléchissants que l'on ne peut pas simplement cacher derrière des panneaux absorbant le son.
- Chambres (partagées): dans les chambres des bâtiments de soins, différents facteurs jouent un rôle. Il y a le bruit qui vient du couloir, le bruit de toutes sortes d'appareils et l'intimité des patients, … trois aspects qu'il est parfois difficile de mettre en concordance. L'isolation acoustique entre la chambre et le couloir est d'ailleurs un problème global qui se présente tant dans les hôpitaux que dans les maisons de repos et autres organismes de soins, tandis que l'aspect de réverbération acoustique est davantage une problématique dans les chambres d'hôpitaux. Si, dans les maisons de repos, les occupants peuvent aménager leur chambre – et donc ajouter des matériaux absorbants comme des meubles, des tapis et des tentures – les chambres d'hôpitaux sont aménagées de manière plus stérile. Les chambres partagées représentent le plus grand défi: ici, une grande absorption doit être répartie sur l'entièreté de la chambre afin de garantir le repos et l'intimité des différents patients.
- Les espaces de vie: le bruit dans les espaces de vie et dans les cafétérias peut non seulement être excessif, mais il est aussi très varié, allant des personnes qui parlent à la télévision, en passant par le tintement des assiettes et des couverts. Une bonne absorption et diffusion acoustique est donc d'une importance cruciale, même si l'intelligibilité de la parole ne peut pas être oubliée. Pour cela, il convient de rechercher un équilibre entre une bonne intelligibilité de près (STI(nearest) > 0,6) et une mauvaise intelligibilité (STI < 0,5) à une certaine distance. De plus, l'isolation entre ces chambres et le couloir doit être suffisante, pour éviter la propagation du bruit au travers du bâtiment.
- Les espaces de consultation: pour les espaces de consultation, il est surtout important que l'intelligibilité soit très bonne à l'intérieur, mais que l'isolation acoustique vers les espaces adjacents soit assez performante pour conserver l'intimité du patient. Les portes représentent le principal point faible.
Des exigences strictes au niveau des matériaux
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La complexité de l'acoustique dans les bâtiments de soin est encore compliquée par des exigences strictes au niveau des matériaux. L'hygiène, la sécurité incendie et la durabilité sont les principaux aspects. En ce qui concerne la sécurité incendie dans les centres de soins, il faut, selon la norme EN 13501-1, utiliser des matériaux qui ralentissent la propagation du feu et qui évitent la formation de fumée et de gouttelettes. Bien qu'il n'y ait pas de normes pour le moment en Belgique au niveau de l'hygiène, les chefs de projet se basent très souvent sur les normes françaises UPEC pour les hôpitaux. Concrètement, il convient ici de trouver un compromis entre les propriétés absorbantes et d'hygiène du matériel: la porosité doit être suffisante pour absorber les ondes sonores, mais ne peut pas, en même temps occasionner de la saleté, de la poussière ou des bactéries.