O-Point (Loppem) a résolument choisi le label bistro pour son côté accessible

Qu'est-ce qu'un nom? Pour les consommateurs, le terme 'restaurant' est le nom générique qui désigne à peu près tous les établissements de restauration. Les initiés, eux, voient les choses de manière beaucoup plus nuancée. Même si tout n'est pas parfaitement logique. Prenons l'exemple de la Stationsstraat, la rue principale de Loppem dans la commune de Zedelgem, où l'on trouve plusieurs restaurants. Il y a, entre autres, un petit restaurant qui se qualifie de brasserie, tandis qu'à une centaine de mètres de là, le O-Point, beaucoup plus grand, s'en tient au terme bistro, qui évoque un 'petit restaurant'. S'agit-il d'une interrogation aussi futile que le sexe des anges? Nous sommes allés voir sur place.
Depuis 2009, Olivier Dardenne est propriétaire et chef d'une ancienne maison de médecin entièrement reconvertie. Lui et son épouse Gaëlle Schelfhout sont originaires de Bruges. Il est diplômé de la célèbre école hôtelière d'Ostende et a effectué sa 7e année de spécialisation (principalement en pâtisserie, chocolat et autres desserts) à Ter Groene Poorte, dans sa ville natale. Sa cuisine atteint un niveau gastronomique élevé. Ainsi, cela fait dix ans que le sacro-saint Gault & Millau attribue au bistro O-Point une note particulièrement élevée de 13/20.
Profil bas
Mais d'abord, pourquoi avoir choisi de s'installer en dehors de sa ville, qui est considérée comme un pôle de restaurants très réputés? Olivier Dardenne: "Nous avons cherché partout, y compris en dehors de Bruges, tout simplement parce que nous n'avions pas les finances pour un avoir un bâtiment dans cette ville. Nous avons fini par nous installer à Loppem, un endroit proche de Bruges et très bien desservi. Quant au bâtiment, il possédait tout ce que nous souhaitions pour nous lancer ici."
Nous voulions aussi un endroit discret, même si je comprends que cela aille à l'encontre de l'aspect commercial. Nous nous sentons très bien ici, loin de l'agitation de la ville. En outre, nous voulions nous développer par nous-mêmes et nous faire un nom indépendamment de la ville touristique et culinaire qu'est Bruges.

Accessibilité
Et puis, il y a la question de l'étiquette 'bistro'. Pourquoi ne pas simplement Restaurant O-Point? Le chef Olivier Dardenne: "En effet, c'est ce qu'on dit souvent mais je pense personnellement que le titre ne détermine pas forcément le niveau de votre restaurant. Il y a des restaurants où l'on se dit: je ne préfère pas manger dans ce bistro, ou inversement. Mais on part d'une idée et on ne sait pas encore où on en est."
Pour nous, l'accessibilité est très importante: que tout le monde se sente bien accueilli, aussi bien les gens qui vont souvent au restaurant que les autres. C'est pourquoi nous avons pensé qu'un bistro serait plus accessible. Le type de cuisine évolue. Or on pourrait dire que 'bistro' est synonyme de plats plus classiques et plus simples. Néanmoins, nous préférons toujours cette appellation."
"Nous travaillons avec très peu de fournisseurs, qui sont très flexibles et avec lesquels nous nous entendons bien"

Un mélange de professionnels et de familles
Olivier Dardenne parle du type de clientèle qu'il reçoit dans son bistro: "Nous avons beaucoup de clients professionnels, surtout en semaine. Mais nous avons aussi une petite salle, qui attire de nombreuses fêtes de famille ou d'autres réunions le week-end. C'est une belle combinaison que de pouvoir accueillir les deux types de clientèle". Il ajoute toutefois que les deux - restaurant (+30 places) et salle de fête (40-50 places) - ne doivent pas nécessairement être occupés en même temps.
En l'état actuel des choses, O-Point fonctionne avec une équipe de cuisine restreinte. Olivier Dardenne est généralement en route dès 8 heures du matin et, à part une pause de midi de temps en temps, il ne s'arrête qu'à la fermeture. Celle-ci intervient généralement entre 23 heures et minuit, en fonction de l'affluence. Depuis huit ans, il emploie un travailleur fixe en cuisine et un travailleur à temps partiel en salle. Pour le reste, il fonctionne avec plusieurs flexi-jobs. Gaëlle, son épouse, donne souvent un coup de main en salle, mais elle garde son emploi à mi-temps à l'AZ St-Jan.

Une cuisine reconnaissable et de saison
Lorsqu'on lui demande quel serait son plat fétiche, Olivier a du mal à répondre: "Ce que je trouve important dans ma cuisine, c'est que tout soit fait maison et frais. Nous achetons le moins possible, c'est-à-dire que nous travaillons avec très peu de fournisseurs qui sont très flexibles et avec lesquels nous passons de bons accords. Je m'occupe moi-même de la fabrication du pain, entre autres. Je ne suis pas un vrai boulanger, mais faire du pain est mon hobby ou plutôt ma passion."
"Je suis également partisan d'une cuisine reconnaissable. Je veux dire par là que vous avez toujours mangé, que vous avez un morceau de viande ou de poisson. J'essaie toutefois d'apporter des touches de modernité. Il peut s'agir d'une petite mousse, par exemple, mais l'assiette ne doit pas être une mousse sous laquelle il faut chercher la nourriture."
"La saisonnalité est également essentielle. En cette période la plus froide de l'année, nous ne travaillons pas avec des tomates, mais uniquement avec des garnitures hivernales. Nous ne faisons pas partie des North Sea Chefs, mais nous n'avons pas besoin de faire partie d'e ce genre d'organisation pour respecter les saisons et orienter notre choix de poisson en fonction du stock disponible sur le moment."

Un futur quartier de restaurants?
Le cœur commercial de Loppem abrite de nombreuses entreprises de restauration. Comment se passent les relations entre eux: plutôt concurrentielles ou plutôt coopératives? Olivier Dardenne: "Chacun fait son métier, on a tous des niveaux différents. Il y a toujours un peu de concurrence entre nous, mais je n'ai pas l'impression que nous nous gênions les uns les autres. Je ne peux pas dire que nous collaborons mais s'il y a un problème ou si quelqu'un manque de quelque chose, nous pouvons nous appeler les uns les autres. Ce n'est pas le cas avec tout le monde, mais nous avons de très bonnes relations avec plusieurs collègues. Appelons ça des 'collègues concurrents'."
Bientôt viendra s'ajouter tout près le restaurant Nous, qui quitte Bruges lui aussi. Envisagez-vous que Loppem devienne quelque part un genre de Stene, c'est-à-dire une destination culinaire attrayante où les clients peuvent alterner? Olivier: "Comme je l'ai dit, on est toujours un peu en concurrence les uns avec les autres, mais on peut aussi voir que l'on se renforce mutuellement. Je pense que ce serait cool pour Loppem si nous pouvions mettre en endroit comme ça sur la carte. Dans un sens un peu plus large, une telle impulsion profiterait à toute la région. J'ai trouvé dommage que le restaurant Ter Leepe à Zedelgem ait fermé ses portes il y a quelques années. Heureusement, le Hertog Jan, rebaptisé depuis Bar Bulot, a pris sa place."

Fiers de la reconnaissance
Ces deux derniers restaurants étaient/sont étoilés au Michelin. Quid des aspirations du bistro O-Point en la matière? Olivier Dardenne: "Nous ne sommes plus au Michelin. Ce serait bien d'y figurer à nouveau, ne fût-ce qu'être mentionnés. Nous y étions il y a quelques années, mais nous avons soudainement disparu et nous ne savons toujours pas pourquoi...
Enfin, nous ne pouvons que continuer. Évidemment, ce ne sont pas les guides qui décident de tout. En fin de compte, nous sommes 'juste' un bistrot. Nous essayons d'atteindre un certain niveau et c'est agréable de recevoir une certaine reconnaissance pour cela. Nous sommes reconnaissants de figurer depuis si longtemps dans le Gault & Millau avec une belle note. Est-ce pour ça qu'on travaille? Non, mais dans notre métier, c'est notre fierté et notre reconnaissance."
Photos: O-Point