L'entretien de la lubrification: une source d'économies

Même en l'absence de problèmes!

Une bonne maintenance de la lubrification est une condition importante pour que les machines et les installations fonctionnent de manière fiable, efficace et sûre. Pourtant, l'absence de pannes ne signifie pas nécessairement que tout est bien organisé. Souvent, il y a encore relativement beaucoup d'améliorations à apporter pour réduire les coûts grâce à des intervalles de maintenance plus longs, moins de lubrifiant et une consommation d'énergie plus faible. Nous avons eu une conversation intéressante à ce sujet avec Peter Bakkum, directeur d'Interflon depuis trois ans et fort de plus de 20 ans de conseil au sein l'industrie internationale.

simple, vraiment?

La lubrification des machines et des pièces de machines a une triple fonction: 1) réduire le frottement, 2) dissiper la chaleur et 3) préserver les surfaces. Lorsque cette fonction est insuffisante, ces trois points peuvent se dégrader. Les conséquences sont graves. De nombreuses études ont été menées dans le monde entier sur l'impact d'une lubrification incorrecte ou insuffisante. Sur la base de ces études, on peut dire qu'en moyenne 20% de la consommation mondiale d'énergie est due à des systèmes qui s'emploient à surmonter les frottements.

Cette consommation d'énergie peut être réduite par une bonne maintenance de la lubrification. Toutefois, si l'on examine de plus près les coûts de maintenance, il apparaît que seuls 1 à 3% du budget de maintenance sont consacrés aux lubrifiants, alors qu'une lubrification incorrecte est à l'origine d'un décuplement (15 à 40%) des coûts de maintenance. Ce constat est d'autant plus évident lorsque l'on examine les chiffres fournis par des fabricants de roulements réputés. Ils ont étudié que sur l'ensemble des cas de défaillance prématurée des roulements, environ la moitié est due à une mauvaise maintenance de la lubrification.

Pas d'amélioration

Peter Bakkum: "Avec ces chiffres, nous ne publions rien de bien neuf en soi. Les conséquences d'une mauvaise lubrification sont connues depuis des années et des recherches sont menées depuis presque aussi longtemps sur des stratégies de maintenance optimale de la lubrification. Une quantité énorme de connaissances a donc été développée en termes de tribologie, de composition des lubrifiants, d'additifs, mais aussi en ce qui concerne la quantité et la fréquence optimales de la lubrification."

"Les fabricants et les fournisseurs de lubrifiants diffusent également ces connaissances, mais nous devons malheureusement constater qu'elles n'ont guère fait la différence jusqu'à aujourd'hui. La quantité d'énergie nécessaire pour surmonter un frottement (trop important) reste élevée, les pièces de machines bloquées et les roulements défaillants en raison d'une lubrification insuffisante et de températures de fonctionnement en hausse restent à l'ordre du jour. Comment cela se fait-il?"

D'une part, une grande partie des problèmes est due à un manque de connaissances. Peter Bakkum: "Lorsque je me suis promené dans la dernière édition de Maintenance Next, j'ai été frappé par le nombre de solutions présentées dans le cadre de la maintenance prédictive. Cependant, en ce qui concerne la maintenance de la lubrification, il serait bon d'aller à l'essentiel: s'assurer que vos composants sont correctement assemblés, correctement alignés et, enfin, correctement lubrifiés."

Une lubrification incorrecte

Cependant, il n'est pas facile de lubrifier correctement si l'on ne dispose pas des connaissances nécessaires, et c'est exactement ce que montre la pratique: Les services de maintenance ne connaissent pas suffisamment le fonctionnement d'un lubrifiant, son importance et la manière dont ils doivent l'appliquer.

En outre, la tâche est souvent laissée à l'opérateur d'une machine, pour qui la lubrification fait partie de la maintenance de première ligne. Ou à l'employé le plus jeune, au sens figuré, qui est envoyé dans l'usine avec le pistolet à graisse pendant les heures perdues. Des problèmes peuvent alors survenir en raison de l'utilisation d'un mauvais lubrifiant, d'une lubrification trop tardive, d'une lubrification incorrecte ou d'une absence de lubrification, en particulier lorsque les raccords de graissage sont difficiles d'accès.

Pas de problème

Peter Bakkum: "Lorsque vous êtes impliqué dans la maintenance de la lubrification presque 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, vous savez que pour certaines entreprises, il est presque inutile de continuer à parler des coûts associés à une mauvaise lubrification. Ces entreprises se concentrent exclusivement sur la production et considèrent comme acquis les temps d'arrêt réguliers, les changements fréquents de roulements, les factures d'énergie élevées et la forte consommation de lubrifiants. Elles ne semblent pas réaliser que la production serait plus élevée si les arrêts non planifiés dus à une mauvaise lubrification étaient évités."

"Ce sont les entreprises qui n'accordent pas suffisamment d'importance à la maintenance de la lubrification qui finissent par subir des pertes inutiles. Des scientifiques de l'université de Southampton ont étudié les pertes de production. Si l'on extrapole ces chiffres aux Pays-Bas, on arrive à un gaspillage presque astronomique de 6 milliards d'euros dû à de gros problèmes de frottement, d'usure et de lubrification."

Heureusement, il y a aussi des entreprises qui reconnaissent leurs problèmes et travaillent à l'amélioration de la maintenance de la lubrification. Peter Bakkum souligne également l'existence d'un dernier groupe d'entreprises qui méritent qu'on s'intéresse à elles: celles qui n'ont pas de pannes ni de problèmes de lubrification.

"Cela peut paraître étrange, mais si l'on y regarde de plus près, l'absence de problèmes est souvent le résultat d'une stratégie de maintenance préventive. Cela signifie, par exemple, que les roulements sont remplacés beaucoup plus rapidement que nécessaire et que la cause sous-jacente de la fin de vie de ces roulements n'est pas examinée. Dans de nombreux cas, il s'agit d'un frottement trop important et donc d'une mauvaise lubrification."

"Les entreprises pourraient améliorer la situation en recadrant et en repensant leur maintenance. C'est ce que j'appelle recadrer la maintenance. Il ne s'agit pas tant de réduire le nombre de pannes que de réaliser des économies significatives sur les coûts de maintenance et de matériel, sur les coûts énergétiques et de contribuer à la réduction des émissions de CO₂."

Approche

Ceux qui décident de prendre le taureau par les cornes peuvent agir à différents niveaux, selon Bakkum: "Vous pouvez prendre des mesures à la fois petites et plus importantes et, idéalement, vous prenez votre temps et mettez des gens à disposition pour aborder cette question de manière presque globale et, surtout, holistique."

La refonte de la maintenance des lubrifiants se fait en plusieurs étapes. La première étape consiste à faire l'inventaire de tous les points de lubrification, des lubrifiants associés et des données relatives à la quantité et à la fréquence de la lubrification. "Avec ces informations, les entreprises seraient bien avisées de faire appel à un spécialiste pour analyser ces données. En effet, que révèlent-elles? Dans la pratique, les entreprises disposent d'un grand nombre de lubrifiants différents dans leur entrepôt."

"Avec une nouvelle machine, par exemple, il y a un nouveau lubrifiant, en cas de problème, on essaie un autre lubrifiant et il y a donc une prolifération de lubrifiants. Un spécialiste peut aider à réduire le nombre de marques et de types différents en choisissant le même lubrifiant - adapté - pour différents points de lubrification. Vos coûts logistiques diminuent, vous pouvez acheter en plus grandes quantités et donc moins cher, vos risques d'erreur diminuent (puisque vous avez moins de choix) et les risques de surdosage sont également réduits. C'est la première étape."

Dans un deuxième temps, il est important de choisir le bon lubrifiant. Bakkum insiste sur ce point: "Il y a un certain nombre d'aspects auxquels il faut prêter attention et qui sont tout à fait logiques si l'on considère les fonctions initiales des lubrifiants. Tout d'abord, il est logique de choisir un lubrifiant qui minimise le frottement. Dans mon entreprise, cette exigence s'est traduite par une technologie développée en interne, dont les propriétés ont été confirmées par plusieurs organismes de test indépendants. La réduction du frottement figure en tête de liste."

Il poursuit: "Il est également très intéressant de voir ce que cela signifie en pratique lorsque vous remplacez un lubrifiant beaucoup moins cher - qui minimise moins bien le frottement - par un meilleur lubrifiant. Dans ces cas réels, nous mesurons la production de chaleur, la quantité de courant consommée par un moteur électrique de l'application, mais aussi les niveaux de bruit, par exemple. La question est de savoir si les coûts supplémentaires d'un tel lubrifiant l'emportent sur les avantages et les économies qui en découlent. Dans presque tous les cas, la réponse est oui."

"Surtout lorsqu'un tel lubrifiant adhère bien et ne s'élimine pas facilement, par exemple dans les applications extérieures ou dans l'industrie alimentaire, où les nettoyages fréquents se font à l'eau. Cela signifie une durée de vie plus longue, (donc) une consommation de lubrifiant plus faible et, en fin de compte, un impact environnemental plus faible, parce que vous produisez moins de déchets."

"Par ailleurs, il convient de noter que chaque application impose ses propres exigences au lubrifiant. Il existe des applications standard, mais aussi des machines qui fonctionnent à des pressions supérieures à la moyenne, à des températures plus élevées ou qui présentent un risque de rouille plus important. Là encore, il est judicieux de consulter un spécialiste ou éventuellement le fournisseur de la machine."

L'avenir

Peter Bakkum conclut: "Il m'arrive aussi de prendre du recul et de regarder de loin le monde et la manière dont l'industrie traite la maintenance des lubrifiants. Je constate alors que les intervenants qui prennent la chose au sérieux, qui l'approfondissent, qui nomment un responsable de toutes les questions de lubrification et qui s'en occupent de manière sensée, en tirent profit à bien des égards."

"Dans une interview que j'ai donnée il y a exactement dix ans, j'avais abordé, entre autres, le manque croissant de personnel qualifié, l'importance de la maintenance basée sur l'état et l'importance croissante des connaissances. Dix ans plus tard, les choses se sont plutôt bien passées et je pense qu'il est bon que les entreprises et les services de maintenance soient conscients des possibilités qui s'offrent à eux. En collaboration avec les fabricants et les fournisseurs de lubrifiants, ils relèvent le défi et nous apportons d'une certaine manière notre pierre à l'édifice d'un monde meilleur."