E-cigarettes

Plus la législation est stricte, plus le marché illégal est important

Après une série de nouvelles mesures contre le vapotage, il semblerait finalement que le gouvernement belge se trompe d'ennemi

Vapes achter slot en grendel
Depuis le 1er avril 2025, les produits de vapotage et tous les autres produits du tabac et produits connexes ne peuvent plus être visibles dans les magasins qui sont encore autorisés à les vendre

Le marché du tabac en Belgique est soumis à une forte pression depuis des années et le marché du vapotage suit le même chemin. Depuis début 2024, le gouvernement prélève des droits d'accises sur les e-liquides, depuis début 2025 les appareils jetables sont interdits, et depuis le 1er avril 2025, les produits de vapotage et tous les autres produits du tabac et produits connexes ne peuvent plus être visibles dans les magasins qui sont encore autorisés à les vendre (magasins d'une surface inférieure à 400m²). Les choses évoluent rapidement. Mais toutes ces règles ont-elles un sens? Car la lutte contre les produits de vapotage illégaux ressemble à un bras de fer dont l'issue est déjà fixée.

Recettes publiques

Depuis le 1er avril 2025, il existe en Belgique une interdiction d'étalage. Tous les produits de vapotage sont retirés des rayons des magasins et donc hors de la vue des clients. Cette mesure s'applique également à tous les produits du tabac. La vision traditionnelle des produits du tabac, de la nicotine et/ou des produits de vapotage derrière le comptoir a cédé la place à des armoires fermées, des tiroirs ou des rideaux.

"Une occasion manquée"

"L'interdiction d'étalage est un coup dur pour les plus de 300 magasins spécialisés", déclare l'organisation professionnelle VapeBel. "Il s'agit d'une occasion manquée, car aucune exception n'a été faite pour les magasins spécialisés, comme le recommandait le Conseil supérieur de la santé. Ces magasins jouent un rôle essentiel en fournissant des informations et un soutien aux adultes qui souhaitent arrêter de fumer."

Flavor Vapers in Lint 
"L'interdiction d'étalage est un coup dur pour les plus de 300 magasins spécialisés", déclare l'organisation professionnelle VapeBel

Outre l'interdiction d'étalage, la vente de produits de vapotage et de tabac est également interdite dans tous les magasins de plus de 400 m², c'est-à-dire principalement dans les supermarchés.

Pour le gouvernement, ces interdictions signifient toutefois qu'une partie de ses recettes pourrait partir en fumée. Jusqu'à présent, le tabac représentait environ 2,5 milliards d'euros de recettes annuelles provenant de la TVA et des accises (2,55 milliards d'euros en 2024 et 2,74 milliards d'euros en 2023, contre 1,96 milliard d'euros en 2010). Les ventes de produits du tabac dans les magasins de plus de 400 m² représentent environ un tiers de ce montant. Les accises sur les e-liquides représentent 20 millions d'euros de recettes en 2024 (la prévision pour 2025 est de 30 millions).

En d'autres termes, le gouvernement belge s'est-il tiré une balle dans le pied? Les fumeurs et les vapoteurs se tourneront-ils vers les petits magasins? Pour Cimabel, la fédération belgo-luxembourgeoise des fabricants de cigarettes, l'affaire est loin d'être gagnée. D'une part, il y a les achats transfrontaliers et, d'autre part, la fédération met en garde contre le risque de transfert de ces ventes vers le marché illégal, qui échappe également aux recettes publiques. Le même danger menace désormais les produits de vapotage officiels.

Crime organisé

Vapotage de THC et de 'spice'

De plus en plus de jeunes vapotent, mais n'achètent pas leur appareil dans un magasin de vapotage légal. Les produits illégaux tels que les smart vapes, qui combinent une cigarette électronique et une sorte de smartphone, sont extrêmement nocifs et faciles à trouver. Les vapes jetables ordinaires, que la Belgique est le premier pays d'Europe à interdire depuis le 1er janvier 2025, les vapes de THC et même les vapes de 'spice', qui créent une forte dépendance, dominent également les cours de récréation.

Smart Vapes zijn illegaal
Les smart vapes illégales circulent de plus en plus parmi les jeunes

Dans une enquête du Centre flamand d'expertise sur l'alcool et les autres drogues (2022-2023), près d'un élève sur quatre âgé de 12 à 18 ans a déclaré avoir vapoté au cours de l'année écoulée. 6,5% ont déclaré le faire régulièrement, soit trois fois plus qu'en 2018-2019. Les cigarettes électroniques illégales sont faciles à obtenir, selon les chiffres du SPF Santé publique et de la fédération industrielle VapeBel. S'attaquer à ce marché noir n'est pas chose aisée. "Il y a un réseau de criminalité organisée derrière tout cela."

Depuis l'apparition de la cigarette électronique, sa popularité auprès des jeunes constitue un problème majeur. Bien qu'elle soit présentée comme un outil permettant aux adultes d'arrêter de fumer, elle se révèle souvent, pour les enfants, un tremplin vers la dépendance à la nicotine. Dans la rue et en ligne, il est facile d'acheter des smart vapes et autres cigarettes électroniques illégales qui ne respectent pas les réglementations. Avec de l'argent liquide, bien sûr.

Ignorance

En Belgique, la concentration de nicotine est limitée à un maximum de 20 milligrammes par millilitre. En outre, la vente aux mineurs est absolument interdite, de même que les emballages colorés. La promotion des cigarettes électroniques n'est pas non plus autorisée. Or, de nombreux jeunes ne savent pas que ce qu'ils achètent est illégal. Mais ils le font quand même parce que les réservoirs sont plus grands et permettent d'obtenir plus de bouffées qu'avec les versions légales.

Un emplâtre sur une jambe de bois

Au total, le service d'inspection du SPF Santé a saisi plus de 115.000 cigarettes électroniques illégales en 2024, contre plus de 45.000 en 2023. L'inspection a contrôlé plus de 2.400 points de vente physiques pour des infractions relatives à la vente de cigarettes électroniques en 2024. Des produits illégaux ont été trouvés dans 62,9% des magasins de nuit et 54,3% des magasins dits 'de jour'. Il s'agit de petits magasins indépendants qui ne vendent que de la nourriture, des boissons et des cigarettes. Les inspecteurs ont également constaté des infractions dans d'autres points de vente, tels que les supermarchés, les magasins de vapotage spécialisés et les stations-service.

Derrière le comptoir

VapeBel a également effectué des contrôles dans un millier de points de vente l'année dernière. La fédération a constaté que près d'un magasin sur cinq (17%) avait tout simplement des cigarettes électroniques illégales en rayon. Et lorsque ce n'est pas le cas, il suffit très souvent de demander ces produits. Ils se trouvent derrière le comptoir. Avec cette enquête, VapeBel souhaite surtout attirer l'attention sur la croissance du marché illégal. La majorité des magasins de vapotage spécialisés - qui, selon le président Felix Rijkers, respectent généralement les règles - doivent faire face à des réglementations de plus en plus strictes, tandis que le circuit illégal en profite.

"Le crime organisé se réjouit dès que les règles se durcissent, car cela ne fait qu'augmenter sa part de marché", déclare  Rijkers. "Nous demandons au gouvernement de se concentrer davantage sur l'application des règles existantes et de s'attaquer réellement à ce marché noir. Regardez les Pays-Bas: là-bas, les arômes sont interdits... mais ont-ils disparu? Absolument pas.

Interdiction des arômes?

Smaakjesverbod ook bij ons?
Malheureusement, l'interdiction des arômes semble n'être qu'une question de temps en Belgique également. Les critiques de VapeBel concernant le passage au circuit illégal sont pour l'instant ignorées par les politiques

Malheureusement, l'interdiction des arômes semble n'être qu'une question de temps en Belgique également. Les critiques de VapeBel concernant le passage au circuit illégal sont pour l'instant ignorées par les politiques. "C'est toujours comme ça que le secteur réagit lorsque nous voulons instaurer une interdiction", entend-on. Bien entendu, il est plus facile de continuer à museler le marché légal que de cibler le marché illégal.

La grande majorité des vapes utilisées par les écoliers sont jetables. Seule une sur sept est légale et rechargeable. C'est ce que dit non seulement VapeBel, mais aussi un rapport du magazine Pano, qui a été diffusé sur la VRT fin avril. Il y a plein de choses qui ne vont pas: les étiquettes ne donnent pas assez d'informations sur le contenu, elles sont trop attrayantes, avec des images d'extraterrestres et de personnages de dessins animés sur l'appareil proprement dit, et des couleurs très vives. Ou encore: il faut tirer une bouffée 3x en deux secondes pour activer le mode musique, une fonction totalement inutile. Mais c'est la réalité. Selon les règles européennes, une vape jetable peut contenir un maximum de 2 ml de liquide. Mais les quantités de 10 ml et plus sont monnaie courante.

Selon Paul Van Den Meerssche, chef du service d'inspection du SPF Santé publique, le commerce illégal croît tout simplement de manière exponentielle avec la législation plus stricte. Sur ce point, il est d'accord avec le président de VapeBel. Depuis l'interdiction des cigarettes électroniques jetables, ses inspecteurs ont déjà saisi plus de 40.000 vapes illégales réparties dans 315 magasins. Mais cela s'apparente à un emplâtre sur une jambe de bois...   

Commerce sur les réseaux sociaux

Et puis il y a les jeunes qui s'installent à leur compte en tant que revendeurs de cigarettes électroniques. Snapchat est un canal de réseaux sociaux particulièrement populaire où se rencontrent revendeurs et clients. Ces vapes jetables contiennent généralement plus de nicotine qu'une cigarette ordinaire. Avec les smart vapes, l'apport en nicotine sur une semaine équivaut à 300 ou 400 cigarettes. Cela correspond à 15 à 20 paquets en une semaine! Même les vapes dont l'emballage indique qu'elles ne contiennent pas de nicotine peuvent en contenir. Divers métaux lourds tels que le nickel, le cuivre, le zinc et le plomb se retrouvent également dans les vapeurs de ces cigarettes électroniques.

Enfin, il y a le danger des vapes au THC et au 'spice'. Le THC, la substance psychoactive de la plante de cannabis, se trouve déjà dans les vapes. Aujourd'hui, les élèves sont défoncés en classe. Pire que les vapes au THC, il y a les vapes au 'spice', qui sont vendues comme des vapes au THC mais qui contiennent en réalité des cannabinoïdes synthétiques et donc non naturels. Ces cigarettes électroniques sont encore plus fortes, créent une dépendance encore plus forte et sont donc encore plus dangereuses. La tendance au 'spice' est venue de Grande-Bretagne et sa popularité augmente régulièrement parmi les jeunes qui vont à l'école. Les phénomènes de sevrage du spice seraient aussi terribles que ceux de l'héroïne.

THC-vapes zijn gevaarlijk
Le THC, le composé psychoactif de la plante de cannabis, est déjà présent dans les cigarettes électroniques

Un business de plusieurs millions 

Felix Rijkers soupire. "Entre-temps, il y a beaucoup d'argent en jeu. Le marché illégal de la vape dans notre pays est devenu un business de plusieurs millions. Il s'agit purement de crime organisé. Il n'y a pas de contrôles, ou du moins trop peu. Récemment, le chef du service des douanes et accises a même admis qu'il y avait trop peu de contrôles au niveau des magasins. Le service des douanes et accises se concentre principalement sur la lutte contre les bandes organisées de trafiquants de drogue. Et les discussions avec les politiques ne sont guère fructueuses. Ils nous associent au secteur du tabac et aucun politicien ne veut s'y brûler les doigts."

"Si la restriction des arômes entre également en vigueur dans notre pays, et compte tenu de ce qui se passe dans nos écoles, il y a de fortes chances que nous suivions la même voie que les Pays-Bas. Là-bas, les arômes n'ont pas disparu des rues. Le marché illégal comblera probablement le vide ici aussi. En attendant, à mon avis, il réalise déjà un chiffre d'affaires de 160 à 180 millions d'euros par an, soit autant que le marché légal. Chaque mois, des centaines de milliers de vapes illégales sont importées en Belgique." La bataille semble déjà perdue....

Quelques chiffres supplémentaires

Contrôles effectués par le Service d'inspection du SPF Santé publique en 2024

1. Contrôles en ligne:
- Quelque 6.000 pages (vendant des e-cigarettes) ont été supprimées sur les grandes plateformes comme Amazon, par exemple (824 dossiers en 2023)
- 66 mesures ont été prises contre des publicités interdites sur des sites web de magasins belges vendant des cigarettes électroniques
- 34 mesures ont été prises contre des ventes interdites sur des boutiques en ligne belges et étrangères (sur un total de 126 boutiques en ligne contrôlées)
- 98 mesures ont été prises à l'encontre d'individus pour vente de cigarettes électroniques via les réseaux sociaux, où 3.800 produits ont été saisis (5.500 vapes saisies auprès de 70 vendeurs en 2023)
- 111 mesures ont été prises à l'encontre de personnes ayant fait de la publicité pour des cigarettes électroniques sur les réseaux sociaux (Facebook et Instagram)
- 1 mesure a été prise pour de la publicité en faveur du tabac par un influenceur sur YouTube.
- Cinq mineurs ont vendu des cigarettes électroniques via Snapchat à leurs amis tout en vendant dans leur école et aux alentours. (Note du service: pour l'instant, il est très difficile d'établir des infractions via Snapchat)

Cette année, l'Inspection a déjà fait des constatations sur deux mineurs, dont un de 14 ans. 120 produits ont été saisis à leur domicile. Ces jeunes sont recrutés par le biais de Snapchat pour mettre en place un commerce. Il s'agit d'un phénomène bien connu aux Pays-Bas. "En outre, il y a une forte probabilité que ces jeunes soient ensuite utilisés pour le trafic de drogue", a déclaré le service d'inspection.

2. Contrôle des importations:
- 400 paquets contenant des cigarettes électroniques pour des particuliers ont été saisis (7.000 cigarettes électroniques)
- l'importation de 100 paquets destinés au commerce a été refusée (20.000 cigarettes électroniques)
- l'importation de 400 paquets destinés à des entreprises commerciales a été bloquée, dont une dizaine a été libérée après enquête (8.000 cigarettes électroniques).

3. Contrôle des cigarettes électroniques dans le commerce régulier:
- Nombre de magasins où les cigarettes électroniques sont contrôlées: 2 850
- Pourcentage de magasins où des infractions concernant les cigarettes électroniques (en particulier les cigarettes électroniques illégales) ont été constatées: 38%

4. Contrôle des ventes aux mineurs dans le cadre du 'commerce légal' (voir encadré):
cijfers mystery shopping

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Écrit par Dimitri Van Moerkercke30 juin 2025

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