"Une alimentation saine se doit d'être inclusive"
Lieven Vanlommel fait rimer Foodmaker et alimentation personnalisée
Lorsque Gino Van Ossel évoque la chaîne de restaurants Foodmaker et son équipe, il ne mâche pas ses mots : ils ont tout simplement changé la donne. En plein dans la deuxième vague de confinement en 2020, le concept horeca a surpris tout le monde et reçu le prestigieux prix Mercure en novembre dernier. Ce faisant, Foodmaker s'est imposée devant des entreprises que l'on aurait pu croire plus fortes telles que Decathlon et Colora, et s'est vue récompensée pour son adaptation ultra rapide et réfléchie pour répondre à la crise du coronavirus et à ses nombreux défis.
un peu d'histoire
Des muffins aux salades
Ce n'est pas la première fois que Foodmaker se réinvente. Lorsque le premier restaurant a ouvert sur le Meirbrug à Anvers à la fin des années 1990, c'était à l'origine un salon qui proposait du café et des muffins. Après un premier rachat par Van Hool, l'accent a été mis sur les sandwiches et les salades fraîches, et il faudra attendre l'arrivée de l'actuel PDG Lieven Vanlommel pour que le concept de restauration rapide saine aboutisse. L'entrepreneur, cuisinier de formation et également propriétaire de Starmeal, a racheté la chaîne en 2013 et se considère comme l'initiateur de la marque saine et cool Foodmaker.
"Pour encourager une alimentation saine, il faut qu'elle soit financièrement attractive", dit-il.
"Comme pour nos plats, nous sommes partis de zéro après l'acquisition. Foodmaker existait déjà, mais la seule chose vraiment intéressante de cette chaîne, c'était ses emplacements stratégiques. Le concept manquait cruellement de clarté et la nourriture proposée était dans l'ensemble trop chère et pas assez gourmande. Tout le contraire de ce que nous visons aujourd'hui, en d'autres termes : des produits cuisinés gourmands et authentiques à un prix abordable."
Des légumes sains
Le goût et la santé sont des éléments phare du concept moderne de Foodmaker ; et les légumes en sont le fondement. Pas étonnant, vu l'hérédité de Vanlommel. "Mon père était grossiste en légumes frais, commerce qui remonte à mon arrière-grand-père en 1925, et ma mère tenait un magasin de fruits et légumes. Elle y préparait des salades pour les entreprises locales. Ma première petite entreprise, fondée en 1996, était tout simplement baptisée Saladebar."
En d'autres termes, le concept sain de Foodmaker repose sur l'utilisation de produits frais, naturels et essentiellement biologiques, exempts d'additifs inutiles tels que les colorants et autres conservateurs. Toutefois, l'entreprise ne suit aucune tendance ou régime particulier. "Chez Foodmaker, les clients trouveront aussi bien des plats classiques que des préparations végétariennes et véganes. Nous ne faisons aucune distinction, et cela nous laisse énormément de liberté. Si nous voulons faire des spaghettis bolognaise, nous faisons une simple bolognaise. Mais sans sucre et riche en légumes."
en coulisses
En dehors du contexte de pandémie, les plats à base de légumes sains de Foodmaker sont aujourd'hui disponibles dans douze restaurants, en grande surface et sur les vols Brussels Airlines. Non seulement en Belgique, mais aussi aux Pays-Bas, en France et en Allemagne. Toutefois, l'entreprise reste avant tout ancrée en Campine. Il n'y a pas si longtemps, Vanlommel a investi dans une toute nouvelle cuisine de 20.000 m2. Une dark kitchen avant-la-lettre, selon ses propres termes. "C'est la cuisine d'un restaurant étoilé au Michelin, mais à grande échelle et avec cinq chefs aux commandes. Deux avec une formation classique, un chef spécialisé dans la cuisine végane, un autre dans les légumes et un chef à domicile." Tout est préparé dans la cuisine. Les légumes et les herbes - provenant des cultures bio de l'entreprise à Diest, et qui s'étendent sur pas moins de 9 hectares - y sont lavés, coupés et si nécessaire cuits à la vapeur ou à l'eau. Les pestos, les vinaigrettes et les sauces sont également des créations 100% maison.
"J'ai une responsabilité envers mes clients", explique M. Vanlommel, ce besoin de contrôle. "Si je dis que quelque chose ne contient aucun colorants ou conservateurs, je dois pouvoir le garantir. Et je ne veux pas que cela coûte une fortune au client. Grâce à notre approche, nous produisons tout au prix coûtant et ne devons répercuter notre profit qu'une seule fois. Cela nous permet de proposer des plats sains abordables et donc inclusifs."
Vedge versus Virus
directement chez le client
C'est ainsi que fonctionne l'entreprise, du moins en temps normal. Car avec la crise sanitaire et le premier confinement, Vanlommel a vu son entreprise, comme d'autres établissements de restauration, perdre pied rapidement. Au lieu de 80.000 repas, la toute nouvelle cuisine ne devait plus en préparer que 10.000 du jour au lendemain. Les mesures du gouvernement ont pour ainsi dire fait rire jaune chez Foodmaker. "Quand vous avez un loyer de 50.000 euros par mois à payer, une aide de 4.000 euros ou rien, c'est du pareil au même. De plus, je ne pouvais introduire une demande d'aide que pour cinq des douze restaurants. Il ne me restait que deux options : accepter et faire faillite, ou trouver une solution."
"Les chefs d'entreprises ont la responsabilité d'offrir à leur personnel des options saines"
Et c'est ainsi que la crise a permis à l'entreprise de concrétiser des idées de longue date et quelque peu oubliées dans le train-train de la vie quotidienne. En un temps record, Foodmaker a développer sur son site web une boutique en ligne pour permettre aux clients de commander des collations, des repas et même des menus complets sur une base quotidienne ou hebdomadaire à livrer à domicile, pour une ou deux personnes. "Nous avons délibérément choisi de ne pas nous tourner vers le concept de plats à emporter et d'aller nous-mêmes chez le client. Lorsqu'on ne sait pas vraiment ce que représente la menace et que des ministres et des virologues vous demandent à grands cris de ne pas sortir de chez vous, il n'est pas responsable pour une entreprise de restauration d'inviter les clients à se déplacer.
Les repas de Foodmaker sont livrés au client directement prêts à être consommés. La boîte à repas DIY qui était à l'origine encore dans la gamme a été rapidement retirée de l'offre. "Une boîte à repas vous évite de sortir faire les courses, mais au final, vous payer cher pour quand même devoir cuisiner par la suite. Ce n'est pas un service de confort. Mais un plat frais, abordable et sans conservateur qu'il suffit de sortir du réfrigérateur et éventuellement de mettre au micro-ondes pendant quelques minutes ? D'un coup, le concept d'alimentation saine est nettement plus accessible."
un concept pertinent
Foodmaker a rebondi de manière très habile face à la crise et en a profité pour renforcer et appuyer sa pertinence sur le marché. Ce qui n'a pas échappé au jury du prix Mercure. "Quand j'ai lancé Saladebar en 1996, on pouvait peut-être compter que 10 % de la population soutenait les alternatives alimentaires saines. Juste avant la crise du coronavirus, plus de la moitié des Belges étaient intéressés par les produits sains, et nous avons depuis vu l'impact qu'un mode de vie sain a sur notre agilité face au virus. Avec le slogan 'Vedge versus Virus', nous mettons clairement en avant notre prise de position."
Cependant, de nombreuses questions subsistent quant à ce qu'implique une alimentation et un mode de vie sains. "Beaucoup de gens ne savent pas exactement ce qu'il vaut mieux manger ou non. Vous restez assis toute la journée ou, au contraire, vous faites du sport ? Ces facteurs peuvent faire toute la différence. C'est pourquoi, avec notre plateforme en ligne, nous faisons également les premiers pas vers une alimentation personnalisée, en élaborant un menu basé sur les macronutriments spécifiques dont une personne a besoin." Avec le passage à l'an neuf et les bonnes résolutions qui l'accompagnent, Foodmaker a donc lancé le programme Back on Track, qui propose un menu hebdomadaire complet et un coaching en ligne.
La responsabilité de chacun
Vanlommel est convaincu que son nouveau concept Foodmaker restera actif en ligne avec son service de repas sains à domicile au lendemain du coronavirus. "Tout le monde a le droit à un bon repas équilibré, et nous voulons que cela soit plus simple pour tout le monde. Nous pensons également que de plus en plus de chefs d'entreprise y prêteront attention. Eux aussi ont en effet une lourde responsabilité envers leurs employés. Qu'ils travaillent au bureau ou à domicile, un employeur devrait pouvoir offrir à son personnel la possibilité de manger sainement."
Petit à petit
perspectives de voyage
Mais comment les autres volets de Foodmaker s'en sortiront-t-ils ? Cinq restaurants belges sont ouverts à la vente à emporter aujourd'hui ; les autres attendent les changements nécessaires des mesures liées au coronavirus. Les activités à l'étranger, qui représentaient encore 60 % du chiffre d'affaires de l'entreprise en 2019, redémarrent dans la mesure du possible et de nouveaux restaurants devraient ouvrir, tant chez nous qu'à l'étranger. "Les douze restaurants de Foodmaker ont été frappés de plein fouet par la crise, mais nous comptons bien en sortir avec trente enseignes", explique Vanlommel dans un élan d'optimisme. "Nous traverserons ensuite l'Atlantique, comme nous avions déjà l'intention de le faire avant la crise sanitaire. Mais pas avant d'avoir mis en place des bases saines dans les pays voisins et d'avoir la certitude que tous les voyants sont au vert."
une équipe aux petits oignons
Mais chaque chose en son temps. Lorsque nous avons rencontré Vanlommel, il était sur le point de donner à son entreprise une véritable pause de Noël, et ce, pour la première fois depuis toutes ces années. "Un effet positif de la Covid-19", admet-il. "Au début de la crise, j'ai d'abord tout fait pour m'assurer de sauver les meubles, mais en cours de route, j'ai appris à mieux connaître mon équipe, à l'organiser et à la motiver. Les liens entre nous et la qualité de notre travail se sont améliorés, et nous nous sommes finalement tous rapprochés, pour ainsi dire, autour d'un objectif commun : assurer la survie de l'entreprise. Le prix Mercure ne me revient pas personnellement, il récompense les efforts de toute l'équipe."