L'impact de la réglementation des machines sur votre chaîne de production

De la protection du matériel à celle des logiciels

Aujourd'hui, grâce à des avancées technologiques impressionnantes, les lignes de production s'automatisent et se numérisent plus rapidement que jamais. L'intelligence artificielle (IA) et l'internet des objets (IoT), par exemple, ont émergé à une vitesse fulgurante ces dernières années et sont déjà devenus indispensables à la production industrielle. Ces évolutions offrent davantage d'efficacité et de flexibilité, mais posent également des risques en matière de sécurité. Le nouveau règlement sur les machines, qui remplace l'actuelle directive sur les machines, vise à gérer ces évolutions technologiques en toute sécurité.

De la directive au règlement

La directive Machines 2006/42/CE, entrée en vigueur en 2006, est une loi européenne qui fixe des exigences en matière de sécurité et de santé pour les machines mises sur le marché européen. La directive met l'accent sur la protection du personnel et de l'environnement physique lors de l'utilisation de machines industrielles. Elle reste importante, mais n'est plus adaptée à un environnement de fabrication de plus en plus numérisé, automatisé et connecté.

La loi devait être révisée, en abordant non seulement la protection du matériel, mais aussi la sécurité des logiciels et des nouvelles technologies. La réponse a été trouvée dans le règlement sur les machines (UE) 2023/1230. Cette loi européenne remplace la directive sur les machines et contient des exigences nouvelles et renforcées en matière de santé et de sécurité qui sont en phase avec l'ingénierie mécanique d'aujourd'hui. Les entreprises ont maintenant le temps de se préparer au règlement sur les machines, qui s'appliquera à partir du 20 janvier 2027.

Harmonisation

Il existe une autre différence importante entre les deux législations. La directive "Machines" - dont le nom dit tout - donnait des indications sur la manière dont les États membres de l'UE devaient transposer la loi dans leur droit national. L'objectif de la loi était le même partout, mais l'interprétation de la directive "Machines" variait d'un pays à l'autre en Europe.

La directive Machines est directement applicable dans tous les États membres et est remplie de la même manière partout. Cette uniformité est importante dans le contexte actuel d'un marché plus vaste et plus complexe afin d'éviter les obstacles au commerce, et devrait donc faciliter le commerce international au sein de l'UE.

Sécurité numérique

La sécurité numérique est l'une des principales nouveautés du règlement sur les machines. La sécurité numérique consiste à protéger les machines, les systèmes de commande et les composants connectés contre les risques numériques tels que les défaillances, les erreurs, le sabotage et les cyber-attaques.

La sécurité numérique couvre, par exemple
- la sécurité des commandes et des systèmes d'exploitation ;
- les mesures de cybersécurité pour les composants connectés tels que les automates et les IHM ;
- des mises à jour logicielles fiables sans risque de défaillance ;
- l'analyse des risques des systèmes d'intelligence artificielle et des algorithmes d'aide à la décision ;
- les exigences accrues en matière de journalisation et de traçabilité numérique des modifications.

Sécurité industrielle

La sécurité industrielle est un élément important de la sécurité numérique. Les machines connectées numériquement - par exemple, via des systèmes en nuage, l'accès à distance ou l'informatique de pointe - sont vulnérables aux attaques, à l'erreur humaine ou au sabotage. Les cyberattaques peuvent entraîner non seulement des temps d'arrêt, mais aussi des situations dangereuses dans l'atelier.

Dès que des interventions sur les commandes peuvent créer des dangers, ces risques doivent être inclus dans l'évaluation des risques liés aux machines. Ces interventions comprennent à la fois les interventions internes effectuées par le personnel de l'entreprise et les "interventions malveillantes provenant de l'extérieur", comme les cyberattaques par exemple.

Par conséquent, le système de contrôle devra être plus fiable et comporter un contrôle d'accès pour le personnel interne, ainsi qu'une protection contre les interventions extérieures. Le règlement exige que les installations industrielles soient physiquement et numériquement sûres. Ceci est particulièrement important pour les systèmes automatisés complexes impliquant plusieurs machines, couches logicielles et réseaux.

Traçabilité et documentation numériques

L'accent est également mis de plus en plus sur la traçabilité. Non seulement les machines et les composants doivent être traçables grâce aux numéros de série ou à la documentation CE, mais les modifications apportées aux logiciels de sécurité doivent également être enregistrées et documentées.

Les machines connectées numériquement sont vulnérables aux attaques, aux erreurs humaines ou au sabotage

Cette traçabilité n'est pas seulement utile lors d'audits ou d'enquêtes sur des incidents, mais elle est également importante pour démontrer la conformité lors de modifications, d'entretien ou d'intégration de nouveaux composants. En particulier dans le cas de modifications importantes apportées aux machines - par exemple, l'ajout d'une cellule robotisée ou la mise à niveau logicielle d'une fonction de sécurité - il est nécessaire de vérifier si un nouveau marquage CE est requis.

Nouvelles technologies

Le règlement sur les machines reconnaît également l'émergence de nouvelles technologies telles que les robots collaboratifs, les robots mobiles autonomes (AGV) et les fonctions de sécurité basées sur l'IA. Par exemple, une installation qui utilise un module d'IA pour la reconnaissance des dangers ou les décisions d'arrêt d'urgence peut désormais entrer dans la catégorie des "produits à haut risque". Ces produits sont soumis à une évaluation obligatoire par unorganisme notifié avant d'être mis sur le marché.

Le règlement prévoit qu'une liste de produits à haut risque sera réexaminée tous les cinq ans. La première révision est prévue pour 2025. Ce mécanisme permet au règlement d'être à la fois flexible et actualisé, ce qui est essentiel dans un monde technologique en évolution rapide.

Répondre aux besoins de l'industrie agroalimentaire

Pour des secteurs tels que l'industrie alimentaire, le règlement sur les machines suscite des préoccupations supplémentaires. Dans ce secteur, la sécurité, mais aussi l'hygiène, sont cruciales en raison de leur impact direct sur la sécurité alimentaire et la protection des consommateurs. Cela se traduit par des exigences spécifiques pour les usines de transformation des aliments.

Exigences spécifiques au secteur alimentaire

• Utilisation de matériaux de contact conformes aux normes de sécurité alimentaire (par exemple, acier inoxydable de qualité alimentaire, pas de surfaces poreuses).
• Conception hygiénique permettant un nettoyage et un démontage faciles, avec des joints lisses et une accumulation minimale de saleté.
• Traçabilité des procédures de nettoyage par le biais de journaux ou d'enregistrements numériques.
• Mesures de sauvetage pour les travailleurs dans des espaces confinés tels que les silos ou les cuves de mélange, y compris les accès et les aides.
• Le sauvetage des personnes dans les espaces confinés est désormais inscrit dans la loi. Cela signifie que les fabricants doivent déjà envisager la possibilité d'une évacuation ou d'un sauvetage, y compris les accès et les aides nécessaires, lors de la conception des installations.
• Les fabricants doivent prévoir des capacités d'évacuation ou de sauvetage dès la conception.

Comment se préparer à la loi?

Bien que le règlement n'entre pleinement en vigueur qu'en 2027, il est essentiel que les entreprises commencent à se préparer dès maintenant. La complexité des nouvelles exigences requiert des connaissances pluridisciplinaires - du génie électrique au génie logiciel et de l'évaluation des risques à la sécurité informatique industrielle.

Dans l'industrie agroalimentaire, la sécurité, mais aussi l'hygiène, sont cruciales en raison de l'impact direct sur la sécurité alimentaire et la protection des consommateurs

Il est conseillé aux entreprises de

• de recycler en temps utile leurs équipes d'ingénieurs et leurs services de maintenance ;
• de mettre à jour les analyses de risques et la documentation relative à la sécurité
• d'investir dans la coopération avec des partenaires spécialisés dans le marquage CE, la sécurité des machines et la cybersécurité ;
• de veiller à l'intégration des nouvelles technologies dans les lignes de production existantes, tout en respectant les exigences applicables.

Chrisophe Michiels, ingénieur senior smart and digital factory chez Sirris, le centre collectif de l'industrie technologique belge, explique dans cet article comment votre entreprise peut se préparer à la nouvelle réglementation sur les machines.

En collaboration avec Pilz et Schmersal