La grande distribution alimentaire en 2025 et les attentes pour 2026 selon Tom Penninckx de NIQ
"Ajustez l'espace de certaines catégories en fonction de la météo"
Tom Penninckx, de NIQ (NielsenIQ), était à nouveau présent pour éclairer les lecteurs de Retail sur les dernières tendances en matière de produits de grande consommation. Nous avons appris que la confiance des consommateurs est en hausse, que les clients restent désireux d'acheter des produits avec des allégations de santé, que la pression des promotions reste élevée et que les magasins peuvent gagner beaucoup s'ils donnent plus d'espace à certaines gammes en temps voulu.
La prudence est de mise
Comment les consommateurs envisagent-ils leur portefeuille en 2025, compte tenu de ce qui se passe autour d'eux et dans le monde?
Tom Penninckx: "Un grand groupe de 40% reste prudent en matière de dépenses, tout comme les années précédentes. Nous constatons que le pourcentage de ceux qui avaient des difficultés et qui s'en sont sortis tranquillement (19% en 2022 et 2023, après la crise sanitaire et l'hyperinflation) a diminué pour atteindre 13%. Nous constatons également une légère amélioration dans le groupe qui se dit en situation d'insécurité financière (19% en 2022, 21% en 2023, 17% en 2025)."
"Les bouleversements mondiaux des cinq dernières années ont entraîné une période de turbulences pour le secteur des produits de grande consommation. Avec l'apparition de la pandémie de Covid (2020), les gens ont commencé à thésauriser (= croissance des volumes). Au deuxième trimestre 2021/premier semestre 2022, la situation s'est normalisée. À partir du troisième trimestre 2022, avec un pic au deuxième trimestre 2023, nous avons assisté à des augmentations de prix dues à l'inflation. Depuis le début de l'année 2024, les choses sont revenues à la normale en termes de volumes et de prix. Depuis un an et demi, on assiste à un refroidissement des niveaux de prix, c'est-à-dire à une stabilisation des prix".
"La confiance des consommateurs a été médiocre pendant la crise, bien meilleure ensuite, avec une nouvelle baisse pendant la période de forte inflation en Belgique, et en mars 2005, les droits d'importation de Trump ont entamé la confiance des consommateurs. En mars 2005, les taxes à l'importation imposées par Trump ont fait chuter la confiance des consommateurs. Au cours des six derniers mois, elle a de nouveau augmenté."
"Néanmoins, les prix des denrées alimentaires restent la plus grande préoccupation: pour 29% des personnes interrogées (contre 32,5% en 2024). La situation géopolitique crée beaucoup plus d'incertitude (23% contre 32,5% en 2024). La bonne nouvelle, c'est que le marché des produits de grande consommation se porte bien dans le monde entier. En Belgique, les prix ont augmenté de 2,3% en 2025, ce qui est tout à fait normal, et le volume de 0,8%."
Sur les marques privées, la pression des promotions et les protéines
La confiance accrue des consommateurs se traduit-elle également par une moindre attention portée au prix, et les marques privées sont-elles perdantes?
"En 2023, les marques privées étaient presque à leur apogée. Elles ont atteint une part de 41,7% en valeur, en 2024 elle était de 41,8%, et le succès se poursuit en 2025 (41,6%). En d'autres termes, une normalisation/stagnation est en cours, elles ne gagnent plus. Du moins pour le moment, car ils continueront à croître à long terme. Mais "pour l'instant", les consommateurs se sentent plus stables financièrement et sont - pour le moment - prêts à payer plus pour des marques A."
"Néanmoins, les marques de distributeur restent fortes en Belgique. Au niveau mondial, notre pays se classe au 6e rang dans ce domaine, après les Pays-Bas (1er rang), la Suisse, le Royaume-Uni, le Portugal et l'Espagne (6e rang). La croissance est donc encore possible et, comme je l'ai dit, je pense que les marques de distributeur continueront à gagner en importance. Je soutiens cette prédiction de la manière suivante: avec l'émergence des grands groupes de distribution (Delhaize fait désormais partie d'Ahold, Colruyt a acheté Match et Smatch...), les marques de distributeur se développeront encore davantage; avec ou sans le soutien de l'IA, les innovations dans la gamme des marques de distributeur passent à la vitesse supérieure; et la génération Z normalise encore davantage les marques de distributeur, qui sont, après tout, les consommateurs de demain."
L'attention plus étroite portée au prix a-t-elle une incidence sur la politique promotionnelle du marché des produits de grande consommation?
"Les consommateurs veulent toujours économiser de l'argent en choisissant des produits moins chers, mais cette importance diminue. De même qu'il attend moins les promotions ou qu'il se rend délibérément chez les discounters. Au contraire, il va accorder plus d'importance aux produits à valeur ajoutée: les produits contenant des protéines, par exemple. Cette tendance s'est déjà manifestée clairement en 2024. Il opte pour une meilleure qualité."
"Pour en revenir aux promotions, la pression est toujours là: 20,3% de tous les produits de grande consommation sont encore achetés en promotion. Il y a plus de promotions sur la santé/beauté (32,6%) et l'entretien ménager (30,2%). Il en va de même pour les produits non alimentaires (y compris les aliments pour animaux de compagnie), afin de contrer le passage à l'achat en ligne. Mais rien ne pourra l'arrêter. Il y a donc plus de place pour les produits frais et sains.
Pour en savoir plus sur ces produits sains: pour quel type de produits exactement les clients veulent-ils dépenser plus d'argent?
"Les consommateurs préfèrent dépenser de l'argent pour des produits frais et des produits laitiers et moins pour des produits surgelés, des boissons alcoolisées et des snacks. Il y a là une grande opportunité pour les supermarchés. Même aujourd'hui, il dit vouloir manger moins au restaurant et préfère dépenser de l'argent pour des produits frais et des produits laitiers, et moins pour des produits surgelés, des boissons alcoolisées et des en-cas.
"La santé l'emporte sur les économies de bouts de chandelle"
À surveiller absolument: les médicaments pour maigrir. Il s'agit déjà d'un marché important aux États-Unis. Les snacks y ont récemment perdu environ 6% de leur valeur. La tendance va s'étendre à l'Europe. 1 consommateur sur 3 serait prêt à essayer de contrôler son poids à l'aide de médicaments.
Quoi qu'il en soit, la "santé" l'emporte sur le "contrôle des dépenses". C'est pourquoi les aliments enrichis en protéines continuent d'être en plein essor. Même si le fromage, la viande et le poisson nous apportent tout autant de protéines, et que les barres protéinées prêtes à consommer (HiPro) et les en-cas sont très chers. Mais oui, ces derniers sont pratiques..."
Beaucoup moins d'alcool, beaucoup plus de produits frais
Cette volonté de santé se retrouve également dans l'offre de boissons.
"40% des Belges déclarent vouloir réduire leur consommation d'alcool. Si en 2021 (Covid) 15,1% des produits scannés dans les supermarchés belges étaient encore des boissons alcoolisées, ce chiffre sera de 11,8% en 2025. Ce marché est clairement en train de s'effondrer. Les Belges changent résolument d'attitude vis-à-vis de l'alcool. Les produits laitiers continuent de gagner de légères parts de marché, les ventes de produits frais continuent d'augmenter sensiblement d'année en année."
"Dans le même ordre d'idées, 7% des bières vendues en Belgique ne contiennent plus d'alcool. Les variantes sans alcool coûtent plus cher et ouvrent une sorte de marché premium. Les apéritifs et cocktails sans alcool augmentent en moyenne de 25,8% par an (au cours des dix dernières années), les bières sans alcool de 21,2%. En comparaison, l'assortiment frais croît de 19,1% en moyenne."
La génération X, très dépensière et adepte du commerce électronique
Quelle est la génération la plus aisée?
"Les baby-boomers (24,3%) et la génération X (24,4%) sont ceux qui dépensent le plus d'argent. Elles sont suivies par la génération Y (20,6% pour les millenials), la génération Z (14,2%) et la génération Alpha (9%). La génération X reste la génération la plus dépensière jusqu'en 2042 (ces données sont basées sur l'ensemble de l'Europe). Cette génération X ne se préoccupe pas des nouveaux produits et aime toujours s'approprier les marques nationales. Elle achète également beaucoup en ligne, même autant que la génération suivante (les millenials ou la génération Y)."
"En zoomant sur les produits qui obtiennent des scores particulièrement élevés en ligne, nous constatons que les grandes marques y jouissent d'une grande confiance: 60,5% de part de marché en valeur contre 30,4% en magasin (chiffres pour la Belgique). Il s'agit certainement des marques axées sur les protéines, ou des gammes bien-être et santé et convenience (type Nespresso). L'alimentation a une part de marché en ligne de 6%. Une forte croissance est donc possible dans ce domaine. Il est important que les supermarchés en tiennent compte. Fait: 25% des couches pour bébés, 40% des brosses à dents électroniques et 15% des rasoirs pour hommes sont déjà achetés en ligne aujourd'hui."
"L'importance du commerce électronique continuera de croître d'année en année, parallèlement à l'arrivée de nouveaux produits innovants. L'intelligence artificielle aidera les fabricants à connaître les besoins des consommateurs, ce qui conduira à de nouveaux produits qui verront le jour. La fidélité diminuera car les consommateurs peuvent être facilement atteints et influencés par le biais d'une variété de canaux."
"L'omni-canal est le mot magique, tout comme le 'commerce social' (ventes directes via les médias sociaux; pensez à la génération Z qui clique directement sur une vidéo TikTok pour accéder à un produit) et le 'commerce rapide' (livraison rapide de l'achat). Les jeunes recherchent encore plus de commodité, préférant se faire livrer leur repas à domicile plutôt que de sortir eux-mêmes."
Faire ses courses en fonction de la météo
Le temps pluvieux de 2024 a eu un impact négatif sur les ventes de boissons rafraîchissantes, de glace et d'eau. À l'inverse, le temps chaud de 2025 pourrait bien avoir été bénéfique pour ces catégories?
"Certaines semaines, les ventes de glace ont augmenté de 82,9%, tout comme les ventes d'eau plate qui ont explosé durant la même période (nous avons atteint 31,6 °C la semaine 25 et 25,9 °C la semaine 27). Il ne faut pas oublier que l'augmentation des ventes de glaces et de boissons s'accompagne d'une augmentation des ventes de produits frais et de nombreux autres produits (cela concerne près de la moitié des produits de grande consommation). En d'autres termes, une période chaude a un impact sur l'ensemble de l'activité."
"Entre mars et août 2025 en Belgique, par exemple, nous avons également observé une croissance à deux chiffres pour les bières sans alcool (qui profitent donc également de la tendance santé), les apéritifs et les cocktails, les fruits, les desserts, les vinaigrettes, les boissons végétales, jusqu'aux produits de soins corporels. Mon conseil aux supermarchés: réorganisez complètement votre magasin pendant ces périodes et ajoutez des réfrigérateurs et des congélateurs. Il est également préférable de donner plus d'espace au rayon fruits en été pour que cette catégorie soit plus performante. Faites de même pour les bières aux fruits, qui sont trois fois plus performantes en été qu'au printemps.
des apéritifs et cocktails, des fruits, des desserts, des vinaigrettes, des boissons végétales et même des produits de soins corporels
Regarder vers l'avenir
Vers 2025
- La confiance des consommateurs évolue positivement.
- Stagnation des ventes de marques de distributeurs.
- La pression promotionnelle est forte.
- Grande préoccupation pour la santé.
- La génération X est celle qui dépense le plus.
- Le temps chaud a entraîné un pic dans la plupart des catégories.
- Davantage de supermarchés restent ouverts le dimanche.
Prédictions 2026 et conseils
- Des augmentations de prix limitées sont attendues.
- La catégorie des marques de distributeur continuera de croître, en partie grâce à l'émergence de grands groupes de distribution et d'IA.
- Le nombre de promotions continuera d'augmenter, ce qui entraînera une pression sur les marges.
- Poursuite de la baisse des ventes de boissons alcoolisées et de l'augmentation des ventes de produits riches en protéines.
- Surveiller l'évolution des médicaments pour le contrôle du poids, qui auront un impact sur notre comportement alimentaire.
- Portez une attention particulière à votre canal en ligne/e-commerce; le commerce social offre également des opportunités.
- Adaptez votre assortiment aux conditions météorologiques; la flexibilité est plus importante que jamais.
- Les clients aiment faire leurs courses le dimanche, un jour de détente sans stress. Il s'agit là aussi d'une question de commodité.